Passioniste de Polynésie

P L BOYER Luc 12/ 49-53

Homélie du 18 août 2013

20ème dimanche du Temps Ordinaire 

L’expansion de l’évangile en Israël et autour de la Palestine a connu des débuts difficiles. Des tensions sont apparues au sein des familles. Les membres d’une même famille se trouvaient divisés par apport à la foi en Jésus Christ. Certaines fois, les évènements devenaient violents. Des chefs de familles juives n’hésitaient pas à dénoncer leur propres enfants pour être mis aux arrêts ; et même pour être mis à mort. Ils préféraient un tel sort pour eux plutôt que de les voir se faire baptiser dans cette nouvelle foi. C’était une vraie trahison pour eux.

Ceux qui se trouvaient dans cette position, c'est-à-dire ceux qui avaient été touchés par la parole du Christ se voyaient comme pris au piège. Une fois que la foi les a touchés, ils avaient compris qu’ils étaient dans une situation de non retour, et que la persécution était inévitable. C’était comme si on leur avait donné un cadeau empoisonné, en leur donnant la foi.

Luc a rencontré beaucoup de chrétiens dans cette position. Nombreux sont ceux qui ont préféré couper les ponts avec leur parents, leurs frères et sœurs, leurs fetii, et qui sont dans une grande souffrance. Certains parmi eux se demandent même s’ils n’auraient pas dû reporter leur baptême à plus tard, attendre que les parents meurent d’abord par exemple, surtout quand ils ont vu le niveau de violence qui a été déclenché (parfois jusqu’à la mort) de la part de leur propre famille.

Dans l’évangile d’aujourd’hui, Luc propose des paroles de réconfort de la part du Seigneur lui-même. D’abord il montre aux chrétiens que ce cas de figure avait déjà été prédit par notre Seigneur : «  Le disciple n’est pas au-dessus de son maître », ou encore : «  car désormais cinq personnes de la même famille seront divisées, deux contre trois et trois contre deux. » Jésus avait préparé ses disciples à cette persécution familiale, bien avant sa mort et sa résurrection.

Ensuite Luc rappelle à son amuiraa  que la persécution d’un chrétien pour sa foi n’est pas du tout signe que Dieu l’abandonne à son sort, et c’est même le contraire : Dieu compte sur ce chrétien pour être témoin, pour montrer aux hommes par sa persévérance que cela vaut la peine de souffrir si cela permet à l’évangile de se propager. 

La première lecture vient illustrer les paroles de Luc. Jérémie est enfermé par les siens dans une citerne de boue, parce qu’il les gène par ses paroles de sagesse. Jérémie se voit pris au piège et pense être abandonné de Dieu. Il se permet de faire des reproches au Seigneur. Il lui dit qu’il regrette d’avoir été choisi par lui pour être son prophète et même d’être venu au monde par la femme.

Enfin Luc ne pouvait pas ne pas prendre la vie même de Jésus comme exemple. S’il y en a un qui aurait des raisons de se plaindre ce serait plutôt Jésus Christ. Il a accepté de rentrer dans le monde sachant bien qu’une fois entré, il serait obligé d’aller jusqu’au bout du témoignage de l’amour. Le monde est devenu pire qu’une citerne de boue pour lui, le piège s’est refermé sur lui. Il aurait pu mille fois reprocher au Père de l’avoir fait naître de la femme, surtout pendant les évènements de la crucifixion. Mais il continua imperturbablement le plan qui était prévu depuis les origines. Sur la croix; il remit toute son œuvre entre les mains du Père : « Père tout est accompli maintenant ». On ne peut pas dire que Jésus était maudit, bien au contraire, c’est le préféré du Père. Luc espère que ces paroles pourraient redonner l’espoir à ceux qui sont persécutés par leur propre famille.

L’auteur de la lettre aux hébreux rencontre le même problème que Luc ; cet amuiraa est composé principalement de juifs d’origine, qui avaient l’habitude d’aller à la synagogue chaque sabbat. La vie était bien réglée pour eux ; vendredi au temple et le samedi à la synagogue. Mais voici que l’évangile du Seigneur a été prêché chez eux aussi. Au lieu que cela apporte la paix et l’harmonie, les familles commencèrent à se déchirer à propos de Jésus. Ils ont été forcés de quitter leur quartier, leur village, leur ville, pour se retrouver entre eux à partager sur les nombreux problèmes auxquels maintenant ils devaient faire face. L’auteur de la lettre aux Hébreux montre ainsi que les communautés qui, ont le plus souffert du passage de l’évangile, ce sont les communautés d’origine juive. Ils étaient rejetés de tous et devaient vivre cachés dans la clandestinité. La peur était leur pain quotidien, peur des romains, peur des membres de leur propre famille qui les recherchaient.

De nos jours nous ne subissons pas la même persécution, mais elle est parfois là, dissimulée sous des attitudes soi disant de tolérance, mais qui s’apparente plus à de la condescendance. Nombreux sont ceux qui pensent que la religion est à l’origine de toutes les violences. Ces personnes pensent que le monde irait mieux si les chrétiens, les musulmans, les bouddhistes, etc. n’existaient pas. L’actualité ne leur donne pas toujours tort (voyez déjà ce qui se passe en Egypte). Au passage notez bien que les deux grandes guerres mondiales n’avaient rien à voir avec la religion (pour ne prendre que cet exemple). Je suis bien persuadé que c’est la mauvaise distribution de l’argent qui est à l’origine de la violence.

Nous avons aujourd’hui le même réflexe que l’amuiraa de la lettre aux Hébreux. Nous vivons notre foi d’une manière semi-clandestine (Laïcité oblige) en prenant garde de ne pas trop se faire remarquer de ces gens qui préfèreraient qu’on ne puisse pas célébrer l’eucharistie, qui voit la religion comme un poison (C’est un peu plus le cas en métropole qu’ici)

Nous prierons aujourd’hui pour tous ceux quine peuvent vivre harmonieusement leur foi dans le Christ Sauveur, qui sont bloqués dans une situation qui dure et qui ne trouvent pas d’issue paisible. Que le Seigneur soit leur réconfort, qu’il vienne à leur secours promptement. Amen

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1ère lecture :  Jérémie 38/ 4-6.8-10

Pendant le siège de Jérusalem, les chefs qui tenaient Jérémie en prison dirent au roi Sédécias : « Que cet homme soit mis à mort : en parlant comme il le fait, il démoralise tout ce qui reste de combattant dans la ville, et toute la population. Ce n'est pas le bonheur du peuple qu'il cherche, mais son malheur. » Le roi répondit : « Il est déjà entre vos mains, et le roi ne peut rien contre vous ! » Alors ils se saisirent de Jérémie et le jetèrent dans la citerne du prince Melkias, dans la cour de la prison. On le descendit avec des cordes. Dans cette citerne il n'y avait pas d'eau, mais de la boue, et Jérémie s'enfonça dans la boue. Un officier du palais, l'Éthiopien Ébed-Mélek, vint trouver le roi : « Mon Seigneur le roi, ce qu'ils ont fait au prophète Jérémie, c'est mal ! Ils l'ont jeté dans la citerne, il va y mourir de faim ! » Alors le roi donna cet ordre à l'Éthiopien Ébed-Mélek : « Prends trois hommes avec toi, et retire de la citerne le prophète Jérémie avant qu'il ne meure. »

 2ème lecture : Hébreux 12/ 1-4

Frères, ceux qui ont vécu dans la foi, foule immense de témoins, sont là qui nous entoure. Comme eux, débarrassons-nous de tout ce qui nous alourdit, et d'abord du péché qui nous entrave si bien ; alors nous courrons avec endurance l'épreuve qui nous est proposée, les yeux fixés sur Jésus, qui est à l'origine et au terme de la foi. Renonçant à la joie qui lui était proposée, il a enduré, sans avoir de honte, l'humiliation de la croix, et, assis à la droite de Dieu, il règne avec lui. Méditez l'exemple de celui qui a enduré de la part des pécheurs une telle hostilité, et vous ne serez pas accablés par le découragement. Vous n'avez pas encore résisté jusqu'au sang dans votre lutte contre le péché.

Evangile : Luc 12/ 49-53

Jésus disait à ses disciples : « Je suis venu apporter un feu sur la terre, et comme je voudrais qu'il soit déjà allumé ! Je dois recevoir un baptême, et comme il m'en coûte d'attendre qu'il soit accompli ! Pensez-vous que je sois venu mettre la paix dans le monde ? Non, je vous le dis, mais plutôt la division. Car désormais cinq personnes de la même famille seront divisées : trois contre deux et deux contre trois ; ils se diviseront : le père contre le fils et le fils contre le père, la mère contre la fille et la fille contre la mère, la belle-mère contre la belle-fille et la belle-fille contre la belle-mère. »

 

Date de dernière mise à jour : 2021-07-04