Sainte Colette de Corbie
Sainte Colette de Corbie (Boylet ou Boëllet) naquit à Corbie, le 13 janvier 1381, de parents très âgés qui attribuèrent sa naissance à l'intercession de saint Nicolas. Sous l'influence de ses parents, elle fut très tôt initiée aux exercices de piété et résolut de se consacrer au Seigneur. Après la mort de ses parents (1399) qui l'avaient confiée à l'abbé de Corbie, elle refusa le mariage et fit plusieurs expériences malheureuses de vie religieuse jusqu'à ce qu'elle rencontrât le R.P. Jean Pinet qui lui proposa de vivre en recluse sous la règle du Tiers-Ordre franciscain, ce qu'elle fit, à partir du 17 septembre 1402, près de l'Eglise Notre-Dame de Corbie. Toutes sortes de visions l'invitaient à quitter son reclusoir pour réformer l'ordre franciscain, mais ne croyant pas qu'elles venaient du ciel, elle résista jusqu'à ce qu'elle fût frappée de cécité puis de mutisme. Elle obtint du Saint-Siège de fonder un monastère réformé au diocèse d'Amiens, de Noyon ou de Paris (29 avril 1406) après qu'elle a reçu la dispense de son voeu de réclusion (1° août 1406). Sous la conduite du R.P. de Baume, elle se rendit en Avignon, près du pape Benoît XIII qui reçut sa profession et la nomma abbesse, dame et mère de toutes celles qui la suivraient (16 octobre 1406). Rejetée de Corbie, puis de Noyon, elle se réfugia en Franche-Comté, au manoir de la Baume-de-Frontenay où elle fut rejointe par ses premières filles. En 1408, elle eut la permission de s'installer à Besançon, ce qu'elle ne fit que le 14 mars 1410 avec l'approbation du pape Alexandre V. Dès lors les fondations se succèdent rapidement dans un florilèges de miracles et sainte Colette précise ses constitutions. Sainte Colette mourut le 6 mars 1447, dans son couvent de Bethléem, à Gand où elle fut enterrée. Comme de nombreux miracles lui étaient attribués, l'évêque de Tournai fit faire une enquête en vue de sa canonisation qui fut retardée par les embarras des guerres d'Italie : elle fut béatifiée en 1625 et canonisée le 24 mai 1807.
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Vierge, réformatrice des Clarisses (1380-1447)
Colette est née à Corbie, en Picardie. Ses parents se désolaient de ne pas avoir d'enfants ; ils prièrent saint Nicolas. Lorsqu'ils reçurent cette petite fille, ils lui donnèrent le nom du saint protecteur : Nicole, en diminutif familier Colette.
Orpheline à dix-huit ans, elle obtint du père Abbé d'un monastère voisin, la possibilité d'entrer chez les béguines d'Amiens malgré son âge. Elle n'y reste qu'un an jugeant leur vie trop douce. Même déception chez les bénédictines, puis chez les clarisses. Son père spirituel est franciscain et comprend son désir d'austérité. Il la fait entrer dans le Tiers-Ordre de Saint François comme recluse à Corbie.
Mais elle se sent appelée à plus de pauvreté encore et, pour cela, elle veut réformer le Second Ordre de saint François, les clarisses. C'est pourquoi elle obtient de rencontrer le pape Benoît XIII qui réside alors en Avignon. Ce pape était un « antipape d'Avignon » du Grand Schisme qui déchirait alors l'Occident. Mais son sens spirituel était réel et profond. Il reçoit la profession religieuse de sainte Colette dans la règle de Sainte Claire et la nomme abbesse de tous les monastères qu'elle sera amenée à fonder ou réformer. Si Colette s'adressa à Benoît XIII, c'est que, dans l'incertitude sur l'obédience à laquelle il fallait se rattacher, elle suivit la France entière, qui avait reconnu le pape d'Avignon ; mais dès les décisions connues du concile de Pise, elle fit ratifier par Alexandre V, l'élu du concile, les faveurs reçues précédemment de Benoît XIII.
Colette vient alors en Franche-Comté et réforme en premier lieu le monastère de Besançon puis bien d'autres en Savoie, Artois, Allemagne et Belgique. Elle mourra à Gand et son corps sera, par la suite, transporté à Poligny dans le Jura.
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«Nous souhaitons particulièrement, écrivait le Pape Pie XII, que sainte Colette de Corbie apprenne à nos contemporains, au milieu de la si grande dissipation et du tumulte des événements, que ce sont les choses qui regardent Dieu et qui portent à embrasser ses très saints commandements qui ont le plus de valeur » (5 décembre 1947, Lettre pour le cinquième centenaire de la mort de sainte Colette de Corbie). Le rayonnement de sainte Colette, qui a réformé l’Ordre des Clarisses au xve siècle, se poursuit jusqu’à nos jours.
Robert Boellet, maître menuisier de l’abbaye bénédictine de Corbie, en Picardie, et son épouse, Marguerite, mènent une vie chrétienne et se dévouent aux pauvres mais les années passent et ils n’ont toujours pas d’enfant. Ils invoquent alors saint Nicolas, et Marguerite, bien qu’âgée de soixante ans déjà, met au monde une fille, le 13 janvier 1381. Au Baptême, on lui donne le nom de “Nicolette” en reconnaissance envers saint Nicolas ; elle sera connue sous le diminutif de Colette.
Faire plaisir à mon père
Très pieuse, Marguerite Boellet se confesse et communie chaque semaine ; elle parle souvent à sa fille de la Passion de Jésus-Christ, dont elle a eu une vision dans son enfance. Pour s’unir aux souffrances de Jésus, Colette fait de nombreux sacrifices, et se prive de manger pour donner son repas aux pauvres. Dotée d’une sagesse au-dessus de son âge, elle affirme : « Si je n’aimais pas les malheureux, il me semble que je n’aimerais pas le bon Dieu. » À l’âge de sept ans, à l’insu de ses parents, elle assiste aux matines chantées la nuit par les moines bénédictins. Sa petite taille déplaît à son père, au point que, dans un accès de mauvaise humeur, il en vient à se plaindre d’être « le père d’une naine ». Attristée de la douleur paternelle, l’adolescente de treize ans prie le Seigneur : « Rester petite ne me gêne pas, pourvu que je sois grande dans votre paradis ; cependant, si vous le voulez, pour faire plaisir à mon père, donnez-moi de grandir. » Dans les années qui suivent, elle grandit jusqu’à atteindre la taille d’1,79 m.
En 1399, Colette est devenue une ravissante jeune fille. Ses parents sont morts. Dom Raoul de Roye, abbé de Corbie, à qui son père l’a confiée, et qui lui sert de tuteur, la pousse à se marier, mais elle refuse. Se voyant l’objet de l’admiration des jeunes gens, elle demande au Seigneur de ternir sa beauté ; quelques instants après, les belles couleurs de son visage disparaissent et laissent place à une pâleur qu’elle gardera toute sa vie. Colette se sent appelée à se dévouer à Dieu et aux pauvres. Dans ce but, elle rejoint les béguines de Corbie ; il s’agit de veuves ou de vierges laïques qui vivent en communauté ou seules, s’adonnent à la contemplation, au travail ou au service des pauvres, et mendient leur pain. L’attrait de Colette pour la prière est satisfait, mais ses désirs d’austérité et de pénitence ne le sont pas. Elle décide donc d’entrer au couvent des Bénédictines de Corbie, non pas comme religieuse, mais au service de l’hôpital annexé au couvent. Cependant, à l’expérience, cela ne lui convient toujours pas, et elle se dirige vers l’abbaye des Clarisses de Pont-Saint-Maxence près de Senlis ; se jugeant indigne d’être reçue en tant que religieuse, elle se présente comme servante. Mais à nouveau, elle trouve les conditions de vie trop douces : les sœurs ne pratiquent plus le renoncement complet voulu par sainte Claire. Colette retourne donc à Corbie où elle est accueillie avec froideur : son apparente inconstance irrite son tuteur, et ses anciennes amies lui tournent le dos. En 1402, elle rencontre le Père Jean Pinet, franciscain, qui lui propose de vivre en recluse sous la règle du Tiers-Ordre franciscain.
Le 17 septembre 1402, à l’âge de vingt et un ans, Colette est installée dans une maison comprenant trois petites pièces, accolée à l’église Notre-Dame-en-Saint-Étienne, à Corbie, où elle restera quatre ans. La porte d’accès en est scellée. La pièce externe comporte la seule fenêtre du lieu ; par là, on fait passer à la recluse sa nourriture, et elle peut s’entretenir avec ceux qui le désirent. La pièce centrale est la chambre, contenant le strict nécessaire. La troisième pièce est l’oratoire, avec un guichet qui donne sur le chœur de l’église : la recluse peut assister aux offices et aux Messes, et recevoir la Sainte Eucharistie. Colette ne demeure pas oisive, mais s’occupe à coudre des habits pour les pauvres, des nappes d’autel, ou à d’autres ouvrages. Des âmes dans l’angoisse ou la perplexité, des prêtres même, viennent à sa fenêtre et, après un entretien tout spirituel, repartent consolés et affermis. Parfois cependant, des gens mal intentionnés l’appellent pour lui dire des insanités.
Ne jamais sortir
Dans cette solitude, Dieu révèle à Colette les mystères de son amour, et son désir de faire d’elle une réformatrice. À cette époque, l’Ordre franciscain connaît, en son sein, des dissensions entre partisans de l’observance stricte de la Règle de saint François d’Assise et partisans d’une discipline moins rigoureuse. En 1263, le pape Urbain IV avait accordé aux couvents de la branche féminine (les Clarisses, filles spirituelles de sainte Claire) l’autorisation de posséder des biens en commun, ce qui contrevenait à la Règle primitive de pauvreté absolue. Qui plus est, cette nouvelle Règle adoucie était interprétée dans un esprit s’écartant davantage encore des premières observances. Saint François et sainte Claire manifestent, eux aussi, à la recluse leur désir de la réforme de l’Ordre. Mais celle-ci craint d’être l’objet d’une illusion du démon et d’être infidèle à sa vocation. Son confesseur discerne le désir authentique de Dieu dans cet appel, mais Colette se récuse : tantôt elle prétexte son ignorance, tantôt elle fait valoir son vœu de ne jamais sortir de sa réclusion. Dieu, alors, lui envoie de nouveaux signes : pendant quelques jours, la vue puis la parole lui sont ôtées. Elle se résout enfin à agir et recouvre l’usage de ses sens. Dieu lui indique la conduite à tenir, et lui montre un arbre qui la représente elle-même, avec des ramifications qui figurent les clercs et laïcs qui adhéreront à la réforme des diverses branches de l’Ordre franciscain.
Dans sa Règle de 1223, saint François portait ses disciples à une pratique spécialement rigoureuse de la pauvreté : « Les frères ne doivent rien posséder : ni maison, ni terrain, ni quoi que ce soit. Comme des pèlerins et des étrangers en ce monde, servant le Seigneur dans la pauvreté et l’humilité, ils iront quêter leur nourriture avec confiance, sans rougir, car le Seigneur, pour nous, s’est fait pauvre en ce monde. Telle est la grandeur de la très haute pauvreté qui vous a établis, vous mes frères très chers, héritiers et rois du royaume des cieux, vous a faits pauvres en bien terrestres mais richement dotés en vertus. Qu’elle soit votre partage, elle qui conduit dans la terre des vivants ! Attachez-vous à elle totalement, frères bien-aimés, et pour le nom de notre Seigneur Jésus-Christ, refusez à jamais de posséder rien d’autre sous le ciel. » En conformité avec la pensée du saint, Colette portera ses religieuses à une pratique fervente de la pauvreté.
« La pauvreté, écrit le Pape Jean-Paul II, confesse que Dieu est l’unique vraie richesse de l’homme. Vécue à l’exemple du Christ qui, de riche qu’il était, s’est fait pauvre (2 Co 8, 9), elle devient une expression du don total de soi que se font mutuellement les trois Personnes divines… La pauvreté évangélique est une valeur en soi, car elle évoque la première des Béatitudes par l’imitation du Christ pauvre… Elle conteste avec force l’idolâtrie de Mammon, en se présentant comme un appel prophétique face à une société qui, dans de nombreuses parties du monde riche, risque de perdre le sens de la mesure et de la valeur même des choses » (Vita consecrata, 25 mars 1996, nos 21 et 90). Le Christ a choisi un mode de vie pauvre pour guérir notre cœur de l’attachement immodéré aux richesses. Le dixième Commandement de Dieu (Tu ne convoiteras pas le bien d’autrui) nous apprend à relativiser les biens d’ici-bas ; il « proscrit l’avidité et le désir d’une appropriation sans mesure des biens terrestres ; il défend la cupidité déréglée née de la passion immodérée des richesses et de leur puissance » (CEC 2536). Les désirs concernant les biens de la terre sont bons en soi, « mais souvent ils ne gardent pas la mesure de la raison et nous poussent à convoiter injustement ce qui ne nous revient pas et appartient, ou est dû, à autrui » (ibid., 2535). Par le vœu de pauvreté, les religieux veulent montrer que Dieu est la seule richesse qui puisse parfaitement contenter le cœur humain. Mais le précepte du “détachement des richesses”, c’est-à-dire l’usage modéré et juste des biens de la terre en vue du salut éternel, est nécessaire à tous pour entrer dans le Royaume des cieux (cf. CEC 2544).
Une opinion erronée
Le Seigneur envoie à Colette des auxiliaires : la comtesse Blanche de Genève, Isabeau de Rochechouart, baronne de Brissay, et le franciscain Henri de la Balme, qui l’accompagneront sur les routes incertaines et la soutiendront devant les oppositions qu’elle rencontrera. En 1406, Colette obtient de Benoît XIII l’autorisation de quitter sa réclusion. Le Grand Schisme d’Occident sévit alors et il y a deux Papes concurrents. Depuis 1378, en effet, l’Église est divisée : les cardinaux, séparés en plusieurs groupes, ont élu deux papes simultanés. Ce schisme durera jusqu’en 1417. Benoît XIII, en fait, n’est pas le vrai pape, mais Colette, de bonne foi, suit l’opinion du roi de France et de la majorité des évêques français, qui se sont prononcés en sa faveur. Le 14 octobre 1406, elle rencontre Benoît XIII à Nice ; celui-ci la nomme abbesse et mère de toutes les religieuses qui se rangeront sous sa conduite.
De retour à Corbie, Colette se heurte à une forte hostilité : on la méprise, on l’accuse de parjure et même de sorcellerie. Elle se rend alors en Franche-Comté, chez un frère d’Henri de la Balme, au château de Baume-le-Frontenay, accompagnée de trois jeunes filles de Corbie qui vont devenir les premières moniales de l’Ordre réformé. À l’arrivée d’autres postulantes, les sœurs s’installent à Besançon, dans un couvent de Clarisses abandonné. Conformément à la Règle de saint François, les vingt-huit Sœurs de la nouvelle communauté abandonnent propriétés et rentes pour ne vivre que d’aumônes. Leur développement et leur rayonnement suscitent de vives oppositions, mais la Vierge Marie les rassure : « Ne craignez point l’enfer soulevé contre vous ; mon Fils et moi nous ne vous abandonnerons jamais ; votre maison est pour nous un paradis de délices. »
Empressée à obéir
En 1412, Colette visite les Cordeliers de Dole qu’elle aide à se réformer, puis fonde un couvent à Auxonne, en Bourgogne ; des aumônes, qui arrivent à point nommé, permettent la construction du couvent. « C’est vous, ma bonne Mère, qui avez fait cela », dit Colette à la Sainte Vierge. « Non, répond Marie, c’est votre empressement à obéir. » En 1415, elle réalise une fondation à Poligny et y installe une chapelle consacrée à Notre-Dame de Pitié, pour la remercier d’avoir fait tomber, de façon quasi miraculeuse, toutes les oppositions à cet établissement. Le monastère est exigu : il servira de modèle aux autres. Là, Colette fait la cuisine et participe à la vaisselle comme la dernière des postulantes : « Servir Dieu et chanter sa louange, voilà ce que nous avons de plus important à faire », déclare-t-elle. Une autre fondation a lieu à Seurre en 1421. En s’y rendant, Colette trouve la route barrée par le Doubs en crue : elle fait un grand signe de croix puis traverse la rivière en marchant sur les eaux, avec ceux qui l’accompagnent.
Aux xive et xve siècles, sévit la guerre de Cent Ans entre les rois de France et d’Angleterre. Colette s’attire la bienveillance autant de la Maison de Bourgogne, alliée de l’Angleterre, que de la Maison de Bourbon, fidèle au roi de France, et elle met à profit cet avantage pour établir des ponts entre les deux. Après avoir passé seize ans en Bourgogne, elle décide de se rendre dans les États du roi de France. Elle fonde un couvent à Moulins, la capitale du Bourbonnais ; elle se trouvera dans cette ville en 1429, en même temps que sainte Jeanne d’Arc. Suivent d’autres fondations et spécialement celle d’Orbe, en 1430, où elle rédige les Constitutions (commentaire de la Règle) de de son Ordre réformé. Dès les premières années de sa vie de recluse, elle a en effet reçu d’en haut la pleine intelligence de la Règle de sainte Claire. Son texte sera approuvé en 1434 par Guillaume de Casal, Ministre Général de l’Ordre franciscain, puis par plusieurs Papes. Ces Constitutions seront complétées par la suite, après de longues années d’expérience. Colette insiste beaucoup sur la concorde et la charité fraternelle entre toutes les Sœurs. « En tout ce que je dis, explique-t-elle à ses Sœurs, je n’ai pas l’intention de déclarer quoi que ce soit de contraire à saint François et sainte Claire…, mais de faciliter la bonne compréhension de leurs Règles, afin que vous puissiez garder plus parfaitement et avec plus de sécurité leurs enseignements, selon les circonstances des temps présents. »
La réforme porte principalement sur les points suivants : ne sont admises au couvent que les Sœurs capables de soutenir l’austérité de la Règle. Les Sœurs vivent en clôture, dans un silence continuel ; elles n’ont accès au parloir qu’avec l’autorisation de l’abbesse, et à certaines périodes de l’année seulement. Les Sœurs vont toujours pieds nus. Elles ne peuvent posséder ni biens meubles, ni immeubles, ni terres, ni argent. Elles font abstinence perpétuelle de viande, et jeûnent tous les jours, sauf le dimanche et à Noël. Les Sœurs doivent assister avec exactitude à l’Office divin, et reçoivent la Communion eucharistique chaque dimanche.
Une profonde amitié
En 1437, saint Jean de Capistran vient en France muni d’un édit pontifical destiné à unir toutes les branches franciscaines. La réforme inaugurée par Colette lui semble être une nouvelle source de divisions au sein de l’Ordre franciscain. Mais, sur place, il est favorablement impressionné par la vie des Sœurs ; il apprend à connaître Colette et finalement l’approuve. Désormais, les deux saints seront liés par une profonde amitié. Après plusieurs fondations réussies, la fondatrice échoue, en 1445, dans l’établissement d’un couvent à Corbie, en raison de l’opposition des Bénédictins et de la municipalité. Mais des couvents sont fondés en Italie.
Souvent, au cours de sa vie, Colette est gratifiée de phénomènes mystiques extraordinaires : extases, lévitations, connaissance de l’état des âmes du purgatoire, don de prophétie. Elle accomplit beaucoup de miracles, mais elle affirme avec réalisme et humilité : « Seule la foi fait le miracle ; je ne suis qu’un instrument entre les mains de Dieu ». Toutefois, afin de suivre de plus près le Christ et de lutter efficacement contre la concupiscence, elle s’adonne avec ferveur à la pénitence. Lors de ses nombreux déplacements, accueillie triomphalement, parfois dans les demeures des grands de ce monde, elle continue à garder son austérité, et souvent elle l’inspire aux châtelaines qui la reçoivent. Elle a également soif de pureté absolue dans toutes ses actions, désirant qu’elles soient inspirées purement par l’amour de Dieu et de sa très sainte volonté, et non par le désir de paraître et d’être louée. Lorsque c’est possible, elle se confesse tous les jours. Elle introduit dans ses communautés la pratique des trois Ave Maria à la fin de chaque Office liturgique, comme bouclier contre la triple concupiscence. Elle se montre entièrement disponible pour écouter ses Sœurs et les personnes qui viennent la consulter, montrant toujours une grande compassion et une grande bonté pour tous.
Fidèle à l’Église, Colette travaille à l’extinction du schisme qui déchire la chrétienté occidentale. Elle rencontre saint Vincent Ferrier, qui après être passé de la cour de Benoît XIII à celle de Grégoire XII, le vrai Pape, œuvre avec courage et détermination pour l’unité dans l’Église. La réformatrice intervient auprès de l’anti pape Félix V, issu de la maison de Savoie avec laquelle elle a de nombreux liens, pour qu’il abdique, mais en vain. Après la mort de Colette, il fera sa pleine soumission au Pape légitime, et son schisme s’éteindra complètement.
Le Grand Schisme a été une épreuve spécialement grave pour l’Église. Mais, comme remarquait le Pape saint Jean XXIII, dans une réflexion inspirée par la foi et encore très utile aujourd’hui : « L’Église est vivante, comme son divin Fondateur est vivant ! L’Église avance avec la force même de la vie, comme Jésus, après s’être soumis aux servitudes de la nature mortelle, franchit victorieusement la barrière de pierre que ses ennemis ont dressée pour garder sa tombe. L’Église aussi a eu, au cours des siècles, des ennemis qui ont cherché à l’enfermer comme dans un tombeau, et qui ont chaque fois célébré son agonie et sa mort. Mais elle a en soi la force invincible de son Fondateur, et avec Lui elle est toujours ressuscitée, pardonnant à tous et assurant la sérénité et la paix aux humbles, aux pauvres, à ceux qui souffrent, aux hommes de bonne volonté » (Radio-message au monde, 28 mars 1959).
Sainte Colette de Corbie nous a laissé un exemple d’amour de l’Église et de son unité. « L’Église est une, enseigne le Compendium du Catéchisme de l’Église Catholique, parce qu’elle a comme origine et comme modèle l’unité d’un seul Dieu, dans la Trinité des Personnes ; comme fondateur et comme tête, Jésus-Christ, qui rassemble tous les peuples dans l’unité d’un seul corps ; comme âme, l’Esprit Saint, qui unit tous les fidèles dans la communion dans le Christ. Elle a une seule foi, une seule vie sacramentelle, une seule succession apostolique, une espérance commune et la même charité » (n°?161). « Le Christ donne toujours à son Église le don de l’unité, ajoute le Catéchisme, mais l’Église doit toujours prier et travailler pour maintenir, renforcer et parfaire l’unité que le Christ veut pour elle… Le souci de réaliser l’union concerne toute l’Église, fidèles et pasteurs. Mais il faut aussi avoir conscience que ce projet sacré, la réconciliation de tous les chrétiens dans l’unité d’une seule et unique Église du Christ, dépasse les forces et les capacités humaines. C’est pourquoi nous mettons tout notre espoir dans la prière du Christ pour l’Église, dans l’amour du Père à notre égard, et dans la puissance du Saint-Esprit » (CEC nos 820, 822).
Le teint de sa jeunesse
En décembre 1446, Colette se rend à Gand où elle reçoit un accueil triomphal, dans la ville comme dans sa communauté. Cette joie est pourtant tempérée par la nouvelle de sa mort prochaine. En effet, Colette, à qui la date de sa mort avait été révélée plusieurs années auparavant, l’a fait discrètement savoir. Au cours de l’hiver, une grave maladie se déclare, et trois semaines avant sa mort, elle s’adresse à la communauté réunie autour de son lit : « Soyez de vraies et saintes religieuses, aimant Dieu souverainement. » Puis elle entre dans un grand silence. Le 27 février, une splendeur surnaturelle apparaît sur son visage. Un mieux inattendu se produit la semaine suivante, mais le 4 mars, le mal qui la ronge reprend subitement. Elle s’éteint paisiblement le lundi 6 mars 1447, à l’âge de soixante-trois ans. Après sa mort, ses joues retrouvent le teint qu’elles avaient dans sa jeunesse, avant que Dieu ne le lui enlève à sa demande. Suivant son désir, elle est inhumée sans linceul ni cercueil, à même la terre, dans le cimetière de Gand. En 1783, ses ossements seront transportés à Poligny (aujourd’hui dans le département du Jura), son couvent de prédilection. Sa réforme s’étendra en Espagne et dans toutes les colonies espagnoles du Nouveau Monde. Elle a été canonisée par le Pape Pie VII, le 24 mai 1807.
Le monde contemporain, remarquait saint Jean-Paul II, se caractérise par « un matérialisme avide de possession, indifférent aux besoins et aux souffrances des plus faibles et même dépourvu de toute considération pour l’équilibre des ressources naturelles. » La vie consacrée répond aux interrogations que suscite cette mentalité actuelle par « la pauvreté évangélique, vécue sous différentes formes et souvent accompagnée d’un engagement actif dans la promotion de la solidarité et de la charité » (Vita consecrata, n. 89). Laissons-nous inspirer par la pauvreté dont le Seigneur Jésus-Christ, et après lui sainte Colette, nous ont donné l’exemple !
Dom Antoine Marie osb
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Date de dernière mise à jour : 2019-07-24
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