Passioniste de Polynésie

L’intercession

« Je recommande donc, avant tout , que l’on fasse des demandes , des prières , des supplications , des actions de grâce pour tous les hommes (…..) Voilà ce qui est bon et ce qui plaît à Dieu notre sauveur, lui qui veut que tous les hommes soient sauvés.

(1 Tim 2 /1.4 )

On peut se demander pourquoi intercéder, car enfin Dieu pourrait intervenir dans la vie de tous sans notre prière. Certes, Dieu n’a pas besoin de nous, il est assez puissant pour tout faire par lui-même, mais il est aussi l’Amour. Or pour aimer il faut au moins être deux ; on aime l’autre et l’autre nous aime, c’est une force un courant ! On peut vivre en manquant de beaucoup de choses, mais on ne peut vivre sans être aimé. Dieu nous aime, il nous a créés et nous a aimés le premier ! Nous ne faisons que répondre à son amour (en fait nous apprenons à y répondre, tout notre chemin de conversion est là pour en témoigner !)

Dieu nous aime, il attend notre amour, et nous ayant créés à son image il nous appelle à aimer les autres comme lui les aime C’est une relation entre lui et tous les hommes ; entre lui, nous-mêmes et tous nos frères. En cela nous ne faisons que suivre l’exemple de Jésus qui nous a aimés jusqu’au bout de lui-même. Il ne s’est pas contenté de prier pour les hommes et femmes rencontrés sur sa route humaine, il a offert sa vie pour toute l’humanité. Dieu nous appelle à nous aimer, mais il sait que nous sommes faibles et pécheurs et que dans cet état nous ne pouvons rien par nous-mêmes, alors il nous dit : « Demandez moi et moi je vous donnerai ; aimez vos frères et sœurs et moi je les comblerai ! » En fait Dieu qui est tout amour veut nous éduquer à l’amour et l’intercession est une forme de cet amour.  Dieu ne veut rien nous imposer, il attend notre désir, notre demande ; alors il nous donne sa grâce, ses dons, mais même là, il nous laisse libres de les accepter ou de les refuser, d’en vivre ou de les laisser de côté ! Pour Dieu tout est une histoire d’amour ! Un amour qui se donne, se reçoit, se redonne et ainsi de suite ! C’est pour cela que le premier commandement d’où tous les autres découlent est : « Tu aimeras le seigneur ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force et de tout ton esprit, et ton prochain comme toi-même. » (Luc 10/27).

Nous ne pouvons nous dispenser de l’intercession. Qui de nous n’a pas eu un jour besoin de la prière des frères. Et nous voudrions refuser aux autres ce dont nous avons profité nous mêmes ? Posons-nous donc cette question : quel est notre amour réel pour Dieu et pour chacun de ses enfants ? Est-ce que je suis vraiment prêt à m’investir dans cette relation d’amour ?

Dieu cherche des intercesseurs, de vrais intercesseurs mais …. Il a du mal à en trouver. Pourtant l’intercession n’est pas une œuvre facultative que je fais ou ne fais pas selon mes petits désirs personnels. L'intercession ne doit pas être considérée comme une activité parmi d’autres, mais vraiment comme une composante permanente de notre vie chrétienne ! En fait tout acte d’amour de notre vie peut et doit devenir acte d’offrande et d’intercession pour nos frères et sœurs. Si nous intercédons pour quelqu’un c’est que nous l’aimons, même si cet amour n’est pas parfait. Sans cet amour l’intercession n’a aucun sens !

C’est une œuvre d’amour qui nous relie profondément à Dieu et aux autres. L’intercession en effet n’est pas seulement profitable à la personne pour qui on prie, elle l’est aussi à la personne qui intercède. Ainsi dans la logique d’amour de Dieu, le bien que par ma prière, je procure à mon frère, ma sœur, par cette prière, me profite à moi aussi.

La prière d’intercession au premier abord si simple, nécessite en fait certaines dispositions de notre part. Intercéder est un acte d’amour que Dieu prend au sérieux. Intercéder implique donc que nous grandissions toujours plus dans

  1. L’amour de Dieu
  2. La prière
  3. L’amour fraternel
  4. L’abandon
  5. Le service des autres, donc l’oubli de soi
    1. La foi et la confiance

L’amour de Dieu

Quand je viens pour prier, de quelques façons que se soit, je me détourne de moi-même pour me tourner vers Dieu ! Me tourner vers Dieu signifie que je le regarde, que je lui parle ! Si je prends du temps pour le regarder, pour l’adorer, le louer, alors mon amour pour lui va grandir, car lui-même se révélera en moi ! C’est un travail qui se fait généralement en douceur ! Dieu est un soleil qui me réchauffe, qui m’envahit de plus en plus de sa chaleur d’amour. Venir à SOS prière, c’est aussi prendre ce temps de me placer devant Dieu pour lui-même et l’adorer ! Son amour nous envahissant, nous serons de plus en plus capables d’aimer les autres et d’intercéder pour eux .

La prière

L’intercession n’est pas qu’une prière récitée comme par magie ou des mots enfilés l’un après l’autre, sans engagement profond de notre cœur. Nous nous mettons devant Dieu avec toutes les difficultés de nos frères et sœurs, avec toutes les nôtres aussi. Notre première attitude de prière se trouve donc dans l’humilité .Nous ne sommes pas des justes qui prions pour des pauvres ou des pécheurs, nous ne sommes que des frères et sœurs pauvres et pécheurs qui prions pour d’autres frères et sœurs, pauvres et pécheurs. Nous devons donc grandir dans cette prière humble devant Dieu, lui demandant tout, recevant tout de lui et nous remettant totalement à sa volonté quant à sa réponse à notre prière. Nous devons grandir dans la prière confiante, ayant vraiment foi que d’une manière ou d’une autre, Dieu va répondre à notre prière, non parce que c’est NOUS qui prions mais parce qu’il est Amour et que notre humble prière procède de l’amour  pour notre frère ou sœur devant lui.

L’amour fraternel

Je ne peux réellement prier pour quelqu’un si je ne l’aime pas ou si j’éprouve de l’énervement, du ressentiment, voir de la colère ou de la haine envers lui ! Si tel est le cas, il me faut commencer par reconnaître cet énervement, ressentiment colère ou haine devant le Seigneur et lui en demander pardon en le priant de m’accorder la grâce de changer les sentiments de mon cœur. Alors seulement je serai apte à prier pour cette personne.

Plus je vais avancer dans la prière d’intercession, plus l’amour des autres va grandir en moi. Aimer, m’investir dans l’amour ne me sera plus un travail, un effort mais vraiment un besoin vital ! L’amour grandissant en moi je ne serai plus à côté de l’autre le présentant à Dieu en disant : « Seigneur, agis en lui, débrouille toi avec lui. », mais je porterai vraiment l’autre, faisant mienne sa situation et alors je commencerai à dire : « Nous voici ensemble devant toi, aie pitié de nous, réponds à notre prière. ». Grandissant encore plus dans l’amour, je deviendrai capable dans ma propre pauvreté de prendre sur moi les difficultés, les péchés de l’autre et de m’offrir au Père avec Jésus en croix pour réparer les blessures faites au cœur de Dieu, par mon frère, ma sœur, comme si c’était vraiment moi qui les avait commises …. Alors là oui, on commence à aimer les autres comme Dieu les aime.

L’abandon

Nous devons apprendre à dire de tout notre cœur : « Que ta volonté soit faite, pas la mienne.» ce qui signifie : «  Seigneur, je te prie pour telle ou telle chose, je te demande ceci ou cela mais tu sais bien mieux que moi ce qui est bon pour mes frères et sœurs, alors comble les selon ta volonté et ta grande miséricorde. » Apprenons donc ici à ne pas exiger de Dieu la réponse humaine que nous désirons. En aucun cas Dieu est à nos ordres ou à notre service, mais c’est bien nous qui sommes au sien ; et dans l’intercession nous ne sommes que des serviteurs en appelant à l’amour et à la miséricorde de notre maître et Seigneur.

Nous ne devons donc pas prier en voulant voir les fruits de la prière, nous ne sommes que des laboureurs, d’autres viendront semer et récolter derrière nous. De plus Dieu a son temps qui n’est pas le nôtre ; apprenons donc la persévérance de la prière confiante alors même que nous ne voyons rien. Ce n’est pas parce que nous, nous ne voyons rien que Dieu n’agit pas !

Nous devons apprendre aussi à grandir dans l’abandon des fruits de la prière Par nous mêmes , nous n’avons aucune puissance , seul Dieu est puissant et tout nous vient de lui ;nous ne devons donc pas nous approprier les fruits lorsque nous les voyons ; ils ne viennent pas de nous , mais de Dieu seul ! Si le jardinier c’est Dieu, l’eau, c’est la grâce de Dieu, et nous, nous que sommes que les arrosoirs … et les arrosoirs cela se remplace ! ! !

Le fruit de la prière n’appartient pas à l’intercesseur car « le demandant » reste pleinement libre de recevoir ou de refuser la grâce de Dieu. Nous devons donc apprendre à respecter cette liberté, tout comme Dieu la respecte et continuer à aimer notre frère, notre sœur alors même que nous les voyons refuser la grâce de Dieu  et donc nous garder de toute impatience et de tout jugement !

Le service des autres

Intercéder n’est pas seulement faire une prière de quelques minutes et puis on n’en parle plus. Intercéder va beaucoup plus loin. Demander à Dieu d’intervenir dans la vie d’autrui, c’est aussi nous rendre solidaires de nos frères et sœurs. Je me mets donc devant Dieu en position de service pour eux et je vais être autant que possible attentif à eux dans la vie courante s’ils sont près de moi. Si je ne vais pas les revoir, je me mets à la disposition de Dieu pour eux et j’écoute au fond de mon cœur l’élan d’amour que Dieu y met pour eux. Peut-être n’entendrai-je rien, mais peut-être aussi me sentirai-je poussé à vivre telle ou telle chose pour eux. cela peut aller d’un geste concret, tel qu’un coup de fil plus tard pour voir si tout va bien ; à un geste plus spirituel tel que de dire une dizaine du chapelet ou d’aller à la messe pour eux. La prière d’intercession nous engage car elle est amour et l’amour se donne et se reçoit. C’est à travers cet amour concret que nous pouvons rejoindre le cœur de Dieu et que la grâce de Dieu peut agir pleinement en nos frères et sœurs.

A SOS prière l’oubli de soi se manifeste déjà par le fait de venir, de quitter les obligations de sa vie, de renoncer à un temps de loisir. Consacrer 2 heures, voir plus, à SOS est déjà s’oublier soi-même. mais l’intercession ne se limite pas à cela car ces deux heures sont à donner réellement à Dieu et aux autres, ceci implique une présence effective et concrète.

Si je passe mes deux heures centrée sur moi-même, sur ma petite vie, je suis dans l’erreur car cette heure est censée être donnée à Dieu et aux autres. Ils attendent cela, bien plus, ils ont besoin de cela ! Si donc en arrivant  nous avons plein de problèmes dans la tête, commençons par les déposer aux pieds de Jésus, abandonnons nous à lui, demandons lui la grâce de pouvoir répondre à son appel au travers de l’intercession, selon son attente, dans l’amour de lui et des autres.

Si je passe mon temps à dormir, je ne suis plus offert à Dieu et à la prière pour les autres. Si vraiment pour des raisons valables et exceptionnelles je suis trop fatigué et que je m’endorme devant le Seigneur, inutile de culpabiliser, le Seigneur sait la réalité des choses ! Mais il faut faire attention à ce que cela ne soit pas une habitude !

Si je passe mes deux heures à attendre que cela se passe, soit dans un livre personnel, soit dans une douce léthargie, je ne suis pas non plus dans la prière d’intercession. Dans les deux cas je ne suis devenu que le ou la standardiste de SOS ! ! ! L’intercession est plus que cela, c’est un engagement concret de service dans l’amour des autres.

Répondre au téléphone et sentir, voir partager la souffrance de ceux qui appellent nous pousse à grandir dans l’amour des autres. Mais si lorsque nous répondons à un appel nous nous contentons ensuite de le noter dans le cahier pour retourner bien vite à nos propres pensées ou notre propre lecture, il y a un problème, car alors c’est comme si nous disions à Dieu : « Tiens Seigneur, voilà le problème d’un tel, résous le tout seul moi j’ai autre chose à faire tout de suite ! » N’oublions pas que nous sommes là au service de ceux qui appellent, comme un relais entre eux et Dieu. Si nous ne vivons pas ce relais à ce moment précis il est bon de nous interroger sur ce que nous faisons là ! et de savoir alors quel est notre amour et notre respect de Dieu et des autres. Pour bien répondre à l’appel des frères, il est important que nous soyons en prière avant le coup de fil, afin que l’Esprit Saint puisse vraiment guider nos paroles et ouvrir notre cœur à la souffrance de notre interlocuteur, et il est tout aussi important que nous restions dans la prière humble et confiante ensuite pour cet appel. L’intercession est un acte d’amour et l’Amour est le canal de la grâce.

La foi et la confiance

Nous devons grandir dans la foi et croire vraiment que Dieu peut tout. Il a crée le monde et les lois qui le régissent, il peut donc passer au-dessus et accomplir des choses incompréhensible à l’homme. Les miracles existent encore aujourd’hui ! Ce que l’homme ne peut pas, Dieu le peut ! Il nous faut vraiment croire à cela. N’oublions pas toutefois que si Dieu peut tout il ne nous dispense absolument de faire tout ce qui nous est possible ! Ainsi par exemple, en demandant la guérison cela ne nous dispense pas d’aller voir le médecin, celui-ci est aussi le serviteur de Dieu ! ….

Demander une grâce, quelqu’elle soit implique que nous ayons confiance en l’amour de Dieu, en la réponse qu’il va nous faire. C’est une confiance qui doit aller jusqu’à l’audace et nous faire persévérer dans la prière (comme un enfant qui, voulant quelque chose, insiste sans cesse auprès de ses parents) Quand on demande quelque chose à Dieu, on ne fait pas que « déposer une requête sur son bureau » mais on le rencontre, dans une réelle relation d’amour ; notre confiance s’inscrit dans cet amour.

Conclusion

On n’a jamais fini de grandir dans l’amour ; il en est de même dans l’intercession, parce que Dieu nous y envahit et nous appelle ainsi à aimer de plus en plus les autres comme lui les aime. Ainsi l’intercession qui peut paraître si simple au départ, à la portée de tous, en toutes circonstances et en toutes conditions est cependant difficile car si elle se veut vraie, authentique, elle nous appelle  à toujours plus d’humilité, de foi et de charité. Là est son exigence, là est aussi toute sa richesse ! Il n’y a pas de méthode particulière, pas plus qu’une méthode définitive ! L’amour se donne et se reçoit en permanence, cela signifie un mouvement et donc des changements. Acceptons d’évoluer dans notre façon de prier et laissons nous conduire par l’Esprit Saint. Il sait ce qui est bon pour nous et pour les autres dans notre chemin du service du royaume.

Myriam de Gemma

Date de dernière mise à jour : 2022-06-16

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