Passioniste de Polynésie

Saint Nunzio Sulprizio

Bienheureux nunzio sulprizio 11

Abbaye saint joseph de clairval 21150Bien chers Amis,

Le 14 octobre 2018, le Pape François canonisait son prédécesseur Paul VI ainsi que Nunzio Sulprizio, un jeune homme qui avait été béatifié par ce dernier le 1er décembre 1963, en présence de tous les évêques réunis pour le concile Vatican II. Deux aspects caractérisent principalement la vie de Nunzio Sulprizio, soulignait le Pape Paul VI le jour de cette béatification : « La courte durée de sa vie, et le fait qu’il ait été, pendant quelques tristes et dures années de son adolescence, un ouvrier, un pauvre et simple apprenti dans un médiocre atelier de serrurier. Jeune et ouvrier, tel est le double caractère qui semble définir le nouveau bienheureux, et ce caractère est d’une telle splendeur et d’une telle importance qu’il suffit à remplir d’intérêt sa courte et pâle biographie… Nous avons à cœur de nous assurer que ces deux prérogatives de Nunzio Sulprizio, d’être jeune et d’être ouvrier, sont compatibles avec la sainteté. Un jeune homme peut-il être un saint ? Et il sera encore plus intéressant d’arriver à découvrir que notre cher élu fut digne de béatification, non pas bien qu’il fût jeune et bien qu’il fût ouvrier, mais précisément parce qu’il fut jeune et ouvrier. »

Le dimanche 13 avril 1817, vient au monde, dans le village de Pescosansonesco, au centre de l’Italie, un enfant qui reçoit le Baptême le jour même, sous le nom de Nunzio, en l’honneur de l’Annonciation de la Bienheureuse Vierge Marie. Son père, Domenico Sulprizio, est cordonnier, et sa mère, Rosa Luciani, fileuse. L’enfant n’a que trois ans quand il reçoit le sacrement de la Confirmation, lors du passage de l’évêque de Pescara dans une bourgade voisine. En août 1820, Domenico, son père, meurt à l’âge de vingt-six ans, laissant sa femme sans revenus. Deux ans plus tard, Rosa se remarie ; mais le beau-père de Nunzio se montre dur à son égard. Il ne l’affectionne pas beaucoup, le frappe et l’humilie pour la moindre peccadille, en sorte que l’enfant devient timide et particulièrement sensible. Très proche de sa mère et de sa grand-mère maternelle, le jeune garçon fréquente une petite école ouverte par un prêtre. Ce sont les heures les plus sereines de sa vie : il apprend à connaître Jésus, le Fils de Dieu fait homme et mort sur la croix pour l’expiation de nos péchés, commence à prier et s’initie à la lecture et à l’écriture. Le 5 mars 1823, Nunzio perd sa mère et il est accueilli chez sa grand-mère maternelle, Rosaria Luciani, analphabète, mais riche de foi et de charité. L’enfant est mis dans une école destinée aux plus pauvres. Son cœur pur se plaît à servir la Messe et à rendre souvent visite à Jésus au tabernacle ; il éprouve une grande horreur du péché et un vrai désir de ressembler au Seigneur Jésus. Mais, en 1826, à peine âgé de neuf ans, Nunzio a la douleur de perdre sa grand-mère, qu’il aimait profondément. 

En battant l’enclume

L’enfant est alors recueilli par son oncle Domenico Luciani, appelé familièrement “Mingo”. Cet homme adonné à l’alcool est extrêmement colérique, brutal et grossier. Il retire Nunzio de l’école et le garde comme apprenti dans son atelier de forge, où il l’emploie plus de douze heures par jour, sans aucune attention à son jeune âge ni aux nécessités les plus élémentaires de la vie. Lorsqu’il lui semble que son neveu n’est pas assez obéissant, il le laisse sans nourriture. Amaigri, Nunzio s’évanouit parfois, mais l’oncle n’en tient aucun compte. Mingo l’envoie faire des courses, quelles que soient les distances ou les matériaux à transporter. Les coups, accompagnés de jurons et de blasphèmes, ne lui sont pas épargnés. D’autres hommes travaillent à la forge, qui le traitent eux aussi avec cruauté ; conscients de la sensibilité de l’enfant, ils s’amusent à blasphémer devant lui. Nunzio s’enfuit alors en se bouchant les oreilles. Certains jours, épuisé de fatigue et de faim, il demande de l’aide aux voisins. Sa grande foi le soutient et lui permet de ne pas succomber. Dans l’atelier, en battant l’enclume, travail inhumain pour un enfant, il pense à son grand ami, Jésus crucifié, prie et offre ses souffrances, en union avec Lui, en réparation des péchés du monde, pour faire la volonté de Dieu et gagner le Ciel. Le dimanche, même si personne ne l’y envoie, il va à la Messe, sa seule consolation de la semaine.

S’adressant aux jeunes, le pape Paul VI disait : « Votre âge a été illuminé et sanctifié par Nunzio Sulprizio. Cette gloire vous appartient. Il vous dira que la jeunesse ne doit pas être considérée comme l’âge des passions désordonnées, des inévitables chutes, des crises invincibles, des pessimismes décadents, des égoïsmes qui s’affichent. Il vous dira plutôt que la jeunesse est une grâce, un bonheur. Saint Philippe Néri ne répétait-il pas : “Heureux êtes-vous, ô jeunes, qui avez du temps pour bien faire” ? C’est une grâce, c’est un bonheur d’être innocents, purs, joyeux, forts, pleins d’ardeur et de vie, comme le sont et devraient l’être les hommes qui reçoivent le don de l’existence fraîche et nouvelle, régénérée et sanctifiée par le Baptême. Ils reçoivent un trésor à ne pas dissiper follement, mais qui doit être connu, gardé, éduqué, développé et conduit à produire des fruits de vie, bienfaisants pour soi et pour les autres… Il vous enseignera que vous, jeunes, pouvez régénérer en vous-mêmes le monde dans lequel la Providence vous a appelés à vivre, et qu’il vous appartient à vous, les premiers, de vous consacrer au salut d’une société qui a précisément besoin d’âmes fortes et intrépides. Il vous enseignera la suprême parole du Christ : que le sacrifice, la croix est notre salut et celui du monde. Les jeunes comprennent cette suprême vocation. »

L’énergie et la lumière

Par une rude matinée d’hiver, Mingo envoie son neveu, les épaules chargées de matériel, à une ferme isolée. En chemin, Nunzio glisse dans une mare d’eau glacée. Le soir, il revient épuisé, une jambe enflée, brûlant de fièvre, la tête en feu. Il va se coucher sans rien dire, mais le lendemain, il n’en peut plus. Le médicament prescrit par son oncle est simple : la reprise du travail, car, lui assène-t-il, « si tu ne travailles pas, tu ne manges pas ! » Nunzio se remet à l’œuvre. Dès qu’il le peut, il se réfugie pour prier à l’église : la joie, l’énergie et la lumière lui viennent alors de Jésus-Hostie. Lorsqu’il ne peut aller devant le tabernacle, il cherche et rencontre Dieu dans son propre cœur. Grâce à son exceptionnelle union à Dieu, il garde son sourire, et pardonne : « C’est comme Dieu veut ! Que la volonté de Dieu soit faite ! » Sa joie intérieure et sa charité lui attirent la bienveillance des paysans d’alentour qui aiment s’entretenir avec lui. Il en profite pour leur parler de Notre-Seigneur et leur faire tout simplement un peu de catéchisme.

« Et pour vous, travailleurs, ajoutait le Pape Paul VI, le message du bienheureux Nunzio Sulprizio, dit avant tout que l’Église pense à vous, qu’elle vous estime et a confiance en vous, qu’elle voit dans votre condition la dignité de l’homme et du chrétien, que le poids même de votre fatigue est un titre à la promotion sociale et à la grandeur morale. Le message dit encore combien le travail a souffert et qu’il a encore besoin de protection, d’assistance et d’aide pour être libre et humain, et pour permettre à la vie son expansion légitime. Il vous dira encore que le travail ne peut pas se séparer de son grand complément qu’est la religion. C’est la religion qui donne la lumière, c’est-à-dire les raisons suprêmes de la vie, et qui détermine l’échelle des vraies valeurs de la vie elle-même ; c’est la religion qui donne le souffle, c’est-à-dire l’intériorité, la purification, la noblesse, le réconfort à la fatigue physique et à l’activité professionnelle ; c’est la religion qui humanise la technique, l’économie, la vie sociale ; c’est la religion qui fait les travailleurs grands et bons, justes, libres et saints. Nunzio vous dira combien il est injuste de priver la vie du travailleur de son aliment supérieur et de son expression spirituelle qu’est la prière. Il vous dira qu’il n’est rien de plus nocif pour votre esprit, pour votre vie familiale et sociale que d’ignorer le Christ, rien de plus injuste, dangereux et fatal que d’afficher indifférence ou hostilité envers Lui, le grand Ami ; et que finalement personne mieux qu’un travailleur au cœur fort et honnête n’est appelé à être près de Lui, à accueillir son Évangile et à bénéficier de son salut. »

« Tu tireras le soufflet ! »

Un jour, Nunzio reçoit un marteau sur le pied. Pour nettoyer la plaie qu’il s’est faite, il se traîne à la grande fontaine du village, mais il en est bientôt chassé par les femmes qui, venant laver leur linge, craignent qu’il ne souille l’eau. Il ne peut plus travailler comme avant, et son oncle lui dit : « Si tu ne peux plus lever le marteau, tu resteras immobile et tireras le soufflet ! » C’est une torture indescriptible pour l’enfant. Mingo en vient même à l’attacher aux chaînes du soufflet pour l’obliger à travailler. Se rendant enfin à l’évidence, il l’envoie se faire soigner dans une ville voisine, pensant que ce neveu inutile ne reviendra plus. D’avril à juin 1831, Nunzio est hospitalisé, mais le traitement s’avère impuissant à guérir sa plaie qui se gangrène. Ces semaines de repos lui sont pourtant bienfaisantes ; il exerce la charité envers les autres malades, et prie intensément. De retour chez son oncle, il est contraint de mendier pour survivre. « Je souffre très peu, affirme-t-il, pourvu que je parvienne à sauver mon âme, à aimer Dieu ! » Dans cette situation, le crucifix est son unique lumière.

Francesco Sulprizio, autre oncle de Nunzio, est caporal dans l’armée des Bourbons à Naples. Ayant entendu parler du traitement cruel enduré par son neveu, il vient, en 1832, à la forge de Mingo et demande que Nunzio lui soit confié. Le forgeron accepte volontiers que ce travailleur inutile lui soit enlevé. Profondément touché par l’état misérable de l’adolescent, Francesco l’emmène à Naples, et le présente au colonel Felice Worchinger. Homme pieux et charitable, celui-ci se déclare prêt à prendre en charge le garçon et à pourvoir en tout à ses besoins.

La Vierge Marie a mis sur le chemin de Nunzio deux hommes pleins de compassion. À l’occasion de la journée des malades du 11 février 2018, le Pape François nous engageait à demander cette sensibilité à la souffrance du prochain, dont le monde a tant besoin : « C’est à Marie, Mère de tendresse, que nous voulons confier tous les malades dans leur corps et leur esprit, afin qu’elle les soutienne dans l’espérance. Nous lui demandons également de nous aider à être accueillants envers nos frères malades. L’Église sait qu’elle a besoin d’une grâce spéciale pour être à la hauteur de son service évangélique du soin des malades. Par conséquent, que la prière adressée à la Mère du Seigneur nous trouve tous unis en une supplication insistante, pour que chaque membre de l’Église vive avec amour sa vocation au service de la vie et de la santé. »

Comment me plaindre ?

Nunzio est immédiatement emmené à l’hôpital Santa Maria del Popolo, pour les incurables. Déjà des caries ont attaqué ses os, provoquant de vives douleurs. Devant son inaltérable patience et les vertus qu’il manifeste, les médecins et les malades en viennent à le comparer à saint Louis de Gonzague. Un prêtre lui demande : « Souffres-tu beaucoup ? – Oui ; je fais la volonté de Dieu. – Qu’est-ce qui te ferait plaisir ? – Je voudrais me confesser et recevoir Jésus pour la première fois ! – N’as-tu pas encore fait ta première Communion ? – Non, dans notre région, nous devons attendre l’âge de quinze ans. – Et tes parents ? – Ils sont morts. – Et qui pense à toi ? – La Providence de Dieu ! » On le prépare immédiatement à recevoir Jésus-Hostie ; ce jour est vraiment le plus beau de sa vie. Son confesseur dira : « Depuis lors, la grâce de Dieu a commencé à travailler en lui d’une façon extraordinaire, à le faire courir de vertu en vertu. Toute sa personne a respiré l’amour de Dieu et de Jésus-Christ. » Dans son calvaire, Nunzio est gratifié de visions de la Sainte Vierge, des anges et des saints. Les bandages de ses plaies commencent à manifester des propriétés miraculeuses : une dame de la cour de Naples en fait l’expérience en les appliquant à son genou malade. Bouleversé, le colonel se demande : « Comment pourrais-je me plaindre des épreuves que le Seigneur me donne quand je vois l’héroïque courage avec lequel Nunzio porte son mal ? Comment puis-je retarder le moment de partager mon abondance avec les pauvres lorsque lui, qui est sans doute le plus pauvre de tous, refuse ce qu’on lui offre et le donne à d’autres ? »

Les traitements médicaux obtiennent une amélioration : Nunzio peut abandonner ses béquilles et marcher avec l’aide d’un bâton. Sa sérénité s’approfondit par la prière à la chapelle devant le tabernacle et le crucifix, ou bien devant Notre-Dame des Douleurs, ou même au lit. Il devient l’ange et l’apôtre des autres malades, enseigne le catéchisme aux enfants hospitalisés, les prépare à la première Confession et à la première Communion, et leur explique comment vivre plus intensément en tant que chrétiens, à travers la souffrance. Ceux qui l’approchent ressentent le charme de sa sainte vie. Il recommande à ses compagnons d’hôpital : « Sois toujours avec le Seigneur, car tout bien vient de lui. Souffre pour l’amour de Dieu et avec joie ! » Il aime invoquer Notre-Dame en lui disant : « Mère Marie, fais-moi faire la volonté de Dieu ! »

Dans son message pour la journée des malades du 11 février 2017, le Pape François écrivait : « Après être allée à la Grotte, sainte Bernadette, grâce à la prière, transforme sa fragilité en soutien pour les autres et, grâce à l’amour, devient capable d’enrichir son prochain ; et surtout, elle offre sa vie pour le salut de l’humanité. Le fait que la Belle Dame lui demande de prier pour les pécheurs nous rappelle que les infirmes, les personnes qui souffrent, ne portent pas seulement en eux le désir de guérir mais aussi celui de vivre chrétiennement leur vie, en arrivant à la donner comme d’authentiques disciples missionnaires du Christ. Marie donne à Bernadette la vocation de servir les malades et l’appelle à être Sœur de la Charité, une mission qu’elle remplit dans une mesure si haute qu’elle devient un modèle auquel chaque agent de santé peut se référer. Demandons donc à l’Immaculée Conception la grâce de savoir nous mettre toujours en relation avec le malade comme avec une personne qui, certainement, a besoin d’aide, parfois aussi pour les choses les plus élémentaires, mais qui porte en elle un don personnel à partager avec les autres. »

La première personne

À partir du 11 avril 1834, Nunzio loge dans l’appartement du colonel Worchinger, son deuxième père. Il souhaite se consacrer à Dieu. En attendant, il fait approuver par son confesseur une règle de vie qu’il observe avec soin : prière, méditation et Messe le matin, heures d’étude pendant la journée, récitation du Rosaire dans la soirée. Il répand autour de lui la paix et la joie. Le vénérable Gaetano Errico, qui pose les fondations de la congrégation des Sacrés-Cœurs, promet d’accueillir le jeune homme dans sa famille religieuse, dès que les choses seront un peu plus avancées. « C’est un jeune saint, affirme-t-il, et je souhaite que la première personne à entrer dans ma congrégation soit sainte, infirme ou non. » Bientôt, cependant, l’état de Nunzio s’aggrave : le cancer des os dont il souffre ne peut plus être soigné. À l’automne de 1835, les médecins décident l’amputation de la jambe malade, mais la grande faiblesse du patient les oblige à y renoncer.

En mars 1836, la fièvre devient très élevée et le cœur donne des signes de défaillance. La souffrance est très aiguë ; Nunzio prie et s’offre pour l’Église, les prêtres, la conversion des pécheurs. Il dit à ceux qui lui rendent visite : « Jésus a tant souffert pour nous, et, grâce à ses mérites, la vie éternelle nous attend. Si nous souffrons pendant un moment, nous jouirons au paradis… Jésus a beaucoup souffert pour moi. Pourquoi ne pourrais-je pas souffrir pour Lui ?… Je voudrais mourir pour convertir même un seul pécheur. » Le 5 mai, il demande un crucifix et fait appeler le confesseur. Il reçoit les sacrements, et console le colonel, son bienfaiteur : « Réjouis-toi, du Ciel je t’assisterai toujours ». Vers le soir, il s’écrie, tout heureux : « Notre-Dame, Notre-Dame, voyez comme elle est belle ! » et il s’endort dans le Seigneur. Il a dix-neuf ans. Un parfum de roses se répand autour de lui ; son corps, abîmé par la maladie, apparaît singulièrement beau et frais. Sa tombe devient immédiatement un lieu de pèlerinage.

Des fruits inexplicables

Une seule lettre écrite de la main de Nunzio a été conservée. Rédigée quelques mois avant sa mort, elle est adressée à son oncle Mingo. Nunzio n’y manifeste aucune amertume ni aucun ressentiment, car son cœur en était exempt : l’Esprit Saint avait produit en lui ses meilleurs fruits (cf. Ga 5, 22s). Le Pape Paul VI s’interrogeait sur ces fruits, inexplicables sans la grâce : « Il ne sera pas difficile de découvrir chez le bienheureux que l’Église propose aujourd’hui à notre considération, des sujets féconds et profonds d’étude et de sympathie. Son enfance, par exemple, orpheline et pauvre, marquée par tant de détresses, ne nous invite-t-elle pas à une intense méditation, troublante pour qui n’appartient pas à l’école du Christ, sur le mystère de la souffrance innocente ? Et comment une enfance, tout empreinte du sentiment pesant de la solitude, de la misère, de la brutalité même, n’a-t-elle pas engendré comme il advient généralement, un psychisme malade et rebelle, une adolescence insolente et corrompue ? Comment cette vie juvénile malheureuse et manquée s’épanouit-elle dès les premières années en une bonté innocente, patiente et souriante ? Et puis, il y a le problème fondamental de sa vie profondément religieuse. D’où lui vient une piété si vive, si sûre, si persévérante, si personnelle ?… Il se peut, et ce sera là la meilleure des découvertes, qu’il nous arrive de remarquer l’action du divin Maître invisible, qui, comme en beaucoup d’autres vies de saints, fait de l’âme pure et initiée par la douleur au recueillement, l’élève privilégiée qui apprend, non pas dans les livres ni par la voix du maître extérieur, mais d’une certaine science intérieure naissante, les vérités de la foi et les mystères du royaume de Dieu. Ainsi se posera le problème de la capacité de ce jeune homme malade et malheureux à comprendre au-delà de ses propres besoins, les besoins des autres, au-delà de sa propre douleur, aussi celle des autres. La patience, la douceur, la charité prévenante et obligeante de cet adolescent, incurable et boiteux, on peut les raconter, les décrire ; un colonel au grand cœur a un beau rôle dans sa courte histoire. Mais humainement parlant, cette bonté reste inexplicable ; elle nous avertit qu’ici aussi nous nous trouvons en face du secret de l’excellent Nunzio, le secret que nous cherchons précisément à connaître, celui de sa sainteté. »

Dans son homélie de canonisation, le Pape François disait : « Jésus est radical. Il donne tout et demande tout : il donne un amour total et demande un cœur sans partage. Aujourd’hui également, il se donne à nous comme Pain vivant ; pouvons-nous lui donner, en échange, des miettes ? À Lui, qui s’est fait notre serviteur jusqu’à aller sur la Croix pour nous, nous ne pouvons pas répondre uniquement par l’observance de quelques préceptes. À Lui qui nous offre la vie éternelle, nous ne pouvons pas donner un bout de notre temps. Jésus ne se contente pas d’un ‘‘pourcentage d’amour’’ : nous ne pouvons pas l’aimer à vingt, à cinquante ou à soixante pour cent. Ou tout ou rien ! Chers frères et sœurs, notre cœur est comme un aimant : il se laisse attirer par l’amour, mais ne peut s’y attacher que d’un côté seulement et doit choisir : ou bien il aimera Dieu, ou bien il aimera la richesse du monde (cf. Mt 6, 24) ; ou bien il vivra pour aimer, ou bien il vivra pour lui-même (cf. Mc 8, 35). Demandons-nous de quel côté nous sommes. Où en sommes-nous dans notre histoire d’amour avec Dieu ? Nous contentons-nous de quelques préceptes, ou suivons-nous Jésus comme des amoureux, vraiment disposés à quitter quelque chose pour lui ? Jésus interroge chacun d’entre nous, et nous sommes tous, en tant qu’Église, en chemin : sommes-nous une Église qui ne prêche que de bons préceptes ou une Église-épouse qui s’abandonne dans l’amour pour son Seigneur ? »

Demandons à saint Nunzio de nous obtenir la grâce d’un don total de nous-mêmes, chacun selon notre vocation, et d’une pleine docilité à l’action sanctifiante de l’Esprit de Vérité et d’Amour.

Dom Antoine Marie osb

Lettre du 25 décembre 2018   Nativité de Notre-Seigneur Jésus-Christ

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Date de dernière mise à jour : 2019-01-07

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