ROMANO PONTIFICI ELIGENDO
ROMANO PONTIFICI ELIGENDO*
DU PAPE PAUL VI
SUR LA VACANCE DU SIÈGE APOSTOLIQUE
ET L'ÉLECTION DU SOUVERAIN PONTIFE
Première Partie
Vacance du Siège Apostolique
[Manque Partie I, Chap I et II]
CHAPITRE III
DIVERSES CHARGES PENDANT LA VACANCE DU SIÈGE APOSTOLIQUE
14. Selon l'esprit de la constitution apostolique Regimiru Ecclesiae Universae, tous les cardinaux préposés aux dicastères de la curie Romaine et le Cardinal secrétaire d'Etat, lui-même, cessent leurs fonctions à la mort du souverain Pontife, sauf le Camerlingue de la Sainte Eglise Romaine, le grand Pénitencier et le Vicaire général pour le diocèse de Rome, qui continuent à expédier les affaires ordinaires en soumettant au Sacré Collège les Cardinaux celles pour lesquelles on devrait en référer au Souverain Pontife (Cf. Proemium et n. 2 paragr. 5: AAS 59 1967, pp. 889 et 891).
15. Si les charges de camerlingue de la Sainte Eglise Romaine ou de grand pénitencier se trouvent vacantes à la mort du Pontife ou avant l'élection de son successeur, le Sacré Collège devra, le plus vite possible, pourvoir à l'élection du cardinal ou, selon le cas, des cardinaux qui en assumeront les fonctions jusqu'à l'élection du nouveau Pontife. Dans chacun des cas cités, l'élection se fait par vote secret de tous les cardinaux présents, au moyen de bulletins que les cérémoniaires distribuent, recueillent, puis ouvrent en présence du Camerlingue de la Sainte Eglise Romaine et des trois cardinaux assistants, s'il s'agit d'élire le grand Pénitencier, ou bien en présence des trois cardinaux susmentionnés et du secrétaire du Sacré Collège, s'il s'agit d'élire le camerlingue. Sera tenu pour élu et jouira ipso facto de toutes les facultés liées à la charge celui qui aura obtenu le plus grand nombre de suffrages. En cas de parité des votes, la charge reviendra à celui qui appartient à l'ordre le plus élevé; s'ils appartiennent au même ordre, elle reviendra à celui qui a été agrégé le premier au Sacré Collège. Jusqu'à l'élection lu camerlingue, ses fonctions sont exercées par le doyen du Sacré Collège, qui peut prendre sans aucun délai les décisions appelées par les circonstances.
16. Mais si le Vicaire général pour le diocèse de Rome vient à disparaître pendant la vacance du Siège apostolique, le vice-gérant alors en fonction aura toutes et chacune des facultés, toute l'autorité et tout le pouvoir dont Jouissait le même vicaire général pour l'exercice de sa charge, et que le Souverain Pontife lui-même a l'habitude d'accorder temporairement au vice-gérant lorsque le Vicariat est vacant, jusqu'à la nomination du nouveau vicaire général. S'il n'y a pas de vice-gérant ou si celui-ci est empêché, l'évêque auxiliaire plus ancien par la nomination en remplira les fonctions.
17. Au Camerlingue de la Sainte Eglise Romaine incombent, pendant la vacance du Siège apostolique, le soin et l'administration des biens et des droits temporels du Saint-Siège, avec l'aide des trois cardinaux que l'on appelle assistants; il doit pour cela avoir recueilli les suffrages du Sacré Collège une fois pour toutes pour les questions secondaires, et chaque fois dans les cas importants. C'est pourquoi, sitôt reçue du préfet de la Maison du Pape la nouvelle de la mort du Pontife, il doit constater officiellement le décès de ce dernier en présence du maître des cérémonies pontificales, des prélats clercs de la révérende Chambre apostolique et du secrétaire-chancelier de cette dernière, qui dressera l'acte authentique du décès; il devra en outre apposer les scellés aux appartements privés du Pontife; faire part de sa mort au Cardinal Vicaire de la Ville, qui en informera la population romaine par une déclaration spéciale; prendre possession du palais apostolique du Vatican, et faire de même, soit par lui-même soit par un délégué, pour les palais du Latran et de Castel Gandolfo dont il exercera la garde et le gouvernement; déterminer, après avoir consulté les cardinaux chefs des trois ordres, tout ce qui concerne la sépulture du Pontife, à moins que ce dernier, de son vivant, n'ait fait connaître ses volontés à ce sujet; veiller, au nom et avec les consentement du Sacré Collège, à tout ce que les circonstances du moment conseilleront pour défendre les droits du Siège apostolique et assurer sa bonne administration.
18. Le cardinal grand pénitencier et ses collaborateurs pourront, pendant la vacance du Siège, faire et expédier ce qui a été établi par notre prédécesseur Pie XI dans sa constitution apostolique Quae divinitus, du 25 mars 1935 (cf. n. 12; AAS 27, 1935, p. 112 s.).
19. Il appartiendra au doyen du Sacré Collège, dès qu'il aura été informé de la mort du Pontife par le préfet de la Maison du Pape, d'annoncer celle-ci à tous les cardinaux, de convoquer ces derniers aux congrégations du Sacré Collège, et les ayants droit à entrer en conclave au moment voulu. Il fera également part du décès du Pontife aux chefs des Missions diplomatiques accréditées près le Saint-Siège, ainsi qu'aux chefs des Etats dont ils sont les représentants.
20. Comme l'établit la constitution apostolique Regimini Ecclesiae Universae, le substitut de a Secrétairerie d'Etat ou secrétariat du Pape conserve la direction de son service pendant la vacance du Siège, et en répond devant le Sacré Collège des cardinaux (Cf. n. 19, par. 2: AAS 59, 1967, p. 895).
21. De même, la mission et les pouvoirs des représentants pontificaux ne cessent pas durant la vacance du Siège.
22. L'aumônier de Sa Sainteté continue lui aussi à exercer ses œuvres de charité de la même manière que du vivant du Pontife; il est toutefois soumis au Sacré Collège des cardinaux et il en dépend jusqu'à l'élection du nouveau Pontife. Il appartiendra cependant au Camerlingue de la Sainte Eglise Romaine de lui donner mandat pour cela.
23. Pendant la vacance du Siège apostolique tout le pouvoir civil du Souverain Pontife concernant le gouvernement de la Cité du Vatican passe au Sacré Collège des cardinaux; cependant, celui-ci ne pourra porter de décrets qu'en cas d'urgente nécessité et pour le temps de la vacance du Siège, et ces décrets n'auront plus tard de valeur que si le nouveau Pontife décide de les confirmer.
[Manque Partie I Chap IV et V]
Deuxième Partie
L'élection du Pontife Romain
CHAPITRE I
LES ÉLECTEURS DU PONTIFE ROMAIN
33. Le droit d'élire le Pontife romain appartient uniquement aux cardinaux de la Sainte Eglise Romaine, à l'exclusion de ceux qui, aux termes de la loi précédemment publiée (Cf Paul VI, Ingra-vescentem aetatem, n, 2: AAS 62, 1970, p 811), ont déjà accompli leur quatre-vingtième année d'âge au moment de l'entrée en conclave. Le nombre maximum des cardinaux électeurs ne devra pas dépasser le chiffre de 120. Toute intervention de n'importe quelle autre dignité ecclésiastique ou puissance séculière, de quelque degré et de quelque ordre que ce soit, est absolument exclue.
35. Aucun cardinal électeur ne peut d'aucune manière être exclu de l'élection active et passive du Souverain Pontife pour le motif ou sous le prétexte de n'importe quelle excommunication, suspense, interdit ou autre empêchement ecclésiastique; ces censures doivent être considérées comme suspendues, mais seulement en ce qui concerne cette élection.
36. Dès qu'un cardinal de la Sainte Eglise Romaine a été créé et publié en concistoire, il possède par là même le droit d'élire le Pontife, même si la barrette ne lui a pas encore été imposée, si l'anneau propre aux cardinaux ne lui a pas été remis et s'il n'a pas prêté l'habituel serment de fidélité. Mais ne jouissent pas de ce droit les cardinaux canoniquement déposés ou ceux qui, du consentement du Pontife Romain, ont renoncé à la dignité cardinalice. De plus, pendant la vacance du Siège, il n'est pas permis au Sacré Collège des cardinaux de les rétablir et de les habiliter.
37. Nous ordonnons aussi que, après la mort du Pontife, les cardinaux électeurs présents attendent les absents pendant quinze jours pleins, faculté étant toutefois donnée au Sacré Collège des cardinaux de différer de quelques jours l'entrée en conclave, avec cette règle que, passés vingt jours au plus, tous les cardinaux électeurs présents sont tenus d'entrer en conclave et de procéder à l'élection.
38. Cependant, si des cardinaux électeurs arrivent re integra, c'est-à-dire avant que l'Eglise ne soit pourvue d'un pasteur, ils seront admis à participer au processus de l'élection en l'état où ils le trouveront.
39. Tous les cardinaux électeurs, convoqués par le doyen ou par un autre cardinal, agissant en son nom pour l'élection du nouveau Pontife, sont obligés en vertu de la sainte obéissance, d'obtempérer à la convocation et de se rendre au lieu désigné pour l'élection, à moins d'être retenus par la maladie ou par un autre empêchement grave qui devra être reconnu par le Sacré Collège des cardinaux.
40. Si un cardinal ayant droit de vote ne voulait pas entrer au conclave ou si, après y être entré, il en sortait sans une raison manifeste de maladie reconnue sous serment par des médecins, et approuvée par la majorité des électeurs, les autres, sans l'attendre et sans qu'on l'admette à nouveau dans l'opération de l'élection, doivent procéder librement à l'élection du Souverain Pontife. Si, survenant une maladie, un cardinal électeur est contraint de sortir du conclave, on pourra procéder à l'élection sans requérir son suffrage; mais s'il veut revenir au conclave après ou avant le recouvrement de sa santé, qu'il soit admis de nouveau. Si un cardinal a quitté le conclave pour une autre raison grave, reconnue par la majorité des électeurs, il pourra y rentrer aussi longtemps qu'il est réuni.
CHAPITRE II
LE CONCLAVE ET CEUX QUI Y PRENNENT PART
41. L'élection du Souverain Pontife doit être faite en conclave après sa fermeture, étant supprimée toutefois la nullité de l'élection établie à ce sujet par Grégoire XV ou par tout autre décret pontifical. Ce conclave est aménagé dans le Palais du Vatican, suivant l'usage, ou bien, pour des raisons particulières, en un autre lieu.
42. Par conclave, on entend des lieux bien déterminés, constituant comme une retraite sacrée où, après avoir invoqué l'Esprit Saint, les cardinaux électeurs élisent le Souverain Pontife; ces électeurs, les autres officiers et employés ainsi que les conclavistes, s'il y en a, y demeurent jour et nuit jusqu'à ce que l'élection soit terminée, sans avoir aucune relation avec les personnes ou les choses de l'extérieur, selon les modalités et les normes qui suivent.
43. En plus des cardinaux électeurs, doivent entrer au conclave le secrétaire du Sacré Collège des cardinaux qui fera la fonction de secrétaire du conclave; le vicaire général du Pontife romain pour la Cité du Vatican, avec un ou plusieurs aides — au jugement du Sacré Collège — pour le service de la sacristie; le maître des cérémonies pontificales avec les cérémoniaires pontificaux qui exerceront leurs propres fonctions. De plus le cardinal doyen ou le cardinal qui exerce sa fonction pourra prendre avec lui un ecclésiastique pour l'assister.
44. Il y aura par ailleurs quelques religieux prêtres, afin qu'il soit possible de confesser dans les principales langues, deux médecins, dont un chirurgien et un praticien de médecine générale, avec un ou deux infirmiers, l'architecte du conclave, et deux techniciens (cf. NN. 55 et 61) tous seront désignés à la majorité des voix par les cardinaux, sur proposition du Camerlingue et des trois cardinaux assistants. On y ajoutera, pour assurer le service nécessaire du conclave, le nombre voulu de personnes, qui seront nommées par la commission cardinalice instituée à cet effet et dont il est question au n. 13c.
45. Il n'est pas permis aux cardinaux électeurs d'amener avec eux des conclavistes ou des serviteurs personnels, clercs ou laïcs. Cela ne pourra être autorisé que dans des cas particuliers et d'une manière exceptionnelle, pour une raison grave de maladie. Le cas échéant, ils présenteront une demande expresse et motivée au cardinal camerlingue, qui soumettra l'affaire à la commission cardinalice instituée à cet effet; c'est à cette dernière qu'il appartient de décider en la matière et, si elle accueille favorablement la demande, de s'enquérir avec le plus grand soin des qualités des personnes proposées pour cette fonction.
46. Tous les officiers et les employés du conclave, ecclésiastiques ou laïcs, et les conclavistes s'il y en a, devront, sous la responsabilité du Camerlingue de la Sainte Eglise Romaine, prêter serment en latin ou dans une autre langue, après que chacun d'eux aura bien compris l'importance de ce serment et le sens de la formule. C'est pourquoi, un ou deux jours avant l'entrée en conclave, devant le secrétaire du conclave et le maître des cérémonies pontificales, délégués à cet effet par le Camerlingue — devant lequel eux-mêmes doivent avoir prêté serment auparavant — ils prononceront la formule suivante, traduite éventuellement en diverses langues:
Moi, N. N., je promets et fe jure de garder inviolablement le secret sur toutes et chacune des choses qui auront été faites ou décidées dans les congrégations des cardinaux pour l'élection du nouveau Pontife, et sur tout ce qui est fait au conclave ou au lieu de l'élection, concernant directement ou indirectement le scrutin et sur tout ce que je connaîtrai, de quelque manière que ce soit, de sorte qu'il ne me soit permis de le violer ni directement, ni indirectement, ni par signes, ni par paroles, ni par écrit, ni par quelque autre moyen. De même, je promets et je jure de ne me servir au conclave d'aucun instrument émetteur ou récepteur ou d'appareils de prise de vues de quelque sorte que ce soit, et cela sous peine d'excommunication "latae sententiae" très spécialement réservée au Saint-Siège au cas où ces prescriptions seraient transgressées. Je garderai scrupuleusement et religieusement ce secret, même après l'élection du nouveau Pontife, sauf faculté particulière ou autorisation expresse qui me serait accordée par celui-ci.
Je promets et je jure également de n'aider ou favoriser aucune ingérence, opposition ou toute forme d'intervention par lesquelles les autorités civiles, de quelque degré et de quelque ordre que ce soit, ou n'importe quel groupe, ou des personnes, voudraient s'immiscer dans l'élection du Pape.
Que Dieu m'y aide ainsi que ces saints Evangiles de Dieu que Je touche de ma main.
47. Les officiers et tous les autres employés laïcs qui seraient sortis du conclave pour cause — seule admise — de maladie manifeste et notable constatée sous serment par les médecins, et avec le consentement du cardinal camerlingue et des trois cardinaux assistants — eurum onerata conscientia — ne pourront d'aucune manière y revenir; mais, en cas de nécessité, au moment même où les malades s'en iront, d'autres pourront entrer à leur place, après avoir été approuvés et admis légitimement, et après avoir prêté serment.
48. S'il arrive qu'un cardinal électeur accompagné d'un conclaviste meure au conclave, son conclaviste doit aussitôt, sortir du conclave, et il ne peut pas être pris au service d'un autre cardinal électeur au même conclave.
CHAPITRE III
L'ENTRÉE AU CONCLAVE
49. Après les funérailles du Pontife défunt, dûment célébrées, et après que l'on aura aménagé le conclave, les cardinaux électeurs se réunissent, au jour fixé, à la basilique Saint-Pierre ou ailleurs, selon les convenances de temps et de lieu; on y accomplira ce qui est prévu par l'Ordo sacrorum rituum Conclavis. Aussitôt après la célébration de la messe le matin ou, si cela semble plus opportun, dans l'après-midi du même jour, aura lieu l'entrée en conclave.
Lorsque tous sont arrivés à la chapelle, après avoir récité l'oraison prescrite et intimé l'extra omnes, on lit la deuxième partie de la présente constitution, c'est-à-dire "L'élection du Pontife romain". Ensuite tous les cardinaux électeurs prêtent serment selon la formule suivante, qui est lue à haute voix par le cardinal doyen ou par le premier cardinal selon l'ordre et l'âge:
Nous tous et chacun de nous, cardinaux électeurs présents en ce conclave, promettons faisons le vœu et jurons d'observer inviolablement et parfaitement tout ce qui est contenu dans la constitution apostolique "Romano Pontifici eligendo" du Pape Paul VI, datée du 1er octobre 1975. Nous promettons, faisons le vœu et jurons également que quiconque d'entre nous sera, par la volonté de Dieu, élu pontife romain ne cessera jamais d'affirmer et de garantir entièrement et vaillamment, et, s'il en était besoin, de revendiquer les droits spirituels et temporels ainsi que la liberté du Saint-Siège.
Nous promettons et jurons surtout de garder le secret très scrupuleusement vis-à-vis de tous, même de nos conclavistes s'il y en a, sur tout ce qui concerne d'une manière quelconque l'élection du Pontife romain, et sur ce qui se fait dans le conclave ou le lieu d'élection et qui concerne directement ou indirectement les scrutins; de ne violer en aucune façon ce secret, aussi bien pendant le conclave qu'après l'élection du nouveau Pape, sauf faculté particulière ou autorisation expresse qui nous serait accordée par ce même Pape; de ne recevoir d'aucune façon d'une autorité civile quelconque, et sous aucun prétexte la mission de proposer un veto ou une exclusive, même sous forme d'un simple désir, et de ne pas révéler ce veto, de quelque manière qu'il soit parvenu à notre connaissance; de n'aider ou favoriser aucune ingérence, opposition ou toute autre forme d'intervention par lesquelles des autorités séculières, de quelque ordre et de quelque degré que ce soit, ou n'importe quel groupe, ou de personnes voudraient s'immiscer dans l'élection du Pape.
Ensuite chaque cardinal électeur dira: Et moi N. cardinal N., je le promets, jen fais le vœu et je le jure, et il ajoutera en posant la main sur l'Evangile: Que Dieu m'y aide ainsi que ces saints Evangiles de Dieu que je touche de ma main.
Après cela, le cardinal doyen ou le premier des cardinaux selon l'ordre et l'ancienneté exhortera les personnes présentes, en une brève allocution et par des paroles de circonstance, à accomplir l'élection d'une manière régulière et avec une intention droite, en visant uniquement le bien de l'Eglise universelle.
50. Tout cela étant fait, le préfet de la Maison du Pape, le délégué spécial de la commission pontificale pour la Cité du Vatican et le commandant de la Garde Suisse pontificale, auxquels en vertu de la présente constitution est confiée la garde du conclave, doivent prêter serment selon la formule établie, devant le cardinal doyen ou le premier des cardinaux, et en présence de tous les cardinaux, électeurs; prêteront le même serment les prélats clercs de la Chambre apostolique, les protonotaires apostoliques de numero participantium, et les auditeurs de la Rote romaine, qui ont la charge de garder et de surveiller ce qui entre au conclave et ce qui en sort. Ils seront aidés dans cette tâche par les cérémoniaires pontificaux.
51. Après quoi, tous les cardinaux électeurs gagnent les chambres qui leur ont été attribuées, sauf le cardinal camerlingue et les trois assistants qui restent dans la chapelle pour procéder à la fermeture du conclave. Pendant ce temps, les officiers du conclave et les autres employés prêtent le plus tôt possible, s'ils ne l'ont déjà fait, le serment décrit plus haut; la cérémonie a lieu devant le secrétaire du conclave et le maître des cérémonies pontificales, délégués à cet effet par le camerlingue de la Sainte Eglise Romaine.
52. Enfin, lorsque sur l'ordre du cardinal doyen ou du premier des cardinaux, le signal voulu aura été donné, le camerlingue, et les trois cardinaux assistants avec le maître des cérémonies pontificales, les autres cérémoniaires, l'architecte du conclave et les deux techniciens, doivent inspecter les lieux, pour que n'y demeure aucun de ceux qui ne sont pas admis au conclave. Pour cela, ils doivent contrôler aussi ceux qui remplissent un service au conclave, sans oublier les conclavistes éventuels des cardinaux électeurs, afin qu'aucun étranger ne se glisse parmi eux; pour faire ce contrôle, toutes ces personnes recevront l'ordre d'entrer dans la chapelle, où l'on procédera à un appel nominal.
53. En même temps qu'à l'intérieur, le conclave doit être aussi fermé à l'extérieur, après une inspection soigneuse, par le préfet de la Maison du Pape, le délégué spécial de la Commission pontificale pour la Cité du Vatican et le commandant de la Garde Suisse pontificale, en présence du doyen des prélats clercs de la Chambre apostolique, du secrétaire-chancelier délégué du cardinal camerlingue de la Sainte Eglise Romaine, des cérémoniaires et des architectes. Les clés seront ensuite confiées au délégué spécial de la Commission pontificale pour la Cité du Vatican.
54. On rédigera un procès-verbal distinct pour chacune des fermetures effectuées: l'un sera signé par le maître des cérémonies pontificales, le secrétaire du conclave, et aussi par le même maître des cérémonies faisant fonction de notaire, en présence de deux cérémoniaires comme témoins; l'autre sera signé par un des prélats clercs de la Chambre Apostolique, délégué du cardinal camerlingue de la Sainte Eglise Romaine, et cela dans les bureaux du délégué spécial de la Commission pontificale pour la Cité du Vatican, et contresigné par le préfet de la Maison du Pape, le même délégué spécial et le commandant de la Garde Suisse pontificale.
CHAPITRE IV
LE SECRET À GARDER SUR TOUT CE QUI SE PASSE AU CONCLAVE
55. Le cardinal camerlingue et les trois cardinaux assistants pro tempore ont l'obligation de veiller soigneusement, en visitant souvent tous les lieux par eux-mêmes ou par d'autres, à ce que la clôture du conclave ne soit violée d'aucune manière. Deux techniciens participeront toujours à ces visites et ils rechercheront, en usant au besoin des moyens techniques adaptés, les appareils indiqués au n. 61. Si l'un de ceux-ci était découvert, les responsables seraient expulsés du conclave et frappés de peines graves, selon ce que décidera le futur Pontife.
56. Après la clôture du conclave, personne ne doit être admis à s'entretenir avec les cardinaux électeurs ou avec les autres participants au conclave, sinon en présence des prélats auxquels la garde du conclave est confiée et en parlant à voix haute et dans une langue compréhensible. Si quelqu'un par hasard, s'introduit en cachette au conclave, il sera ipso facto privé de tout honneur, grade, charge et bénéfice ecclésiastique ou, selon la condition de la personne, il lui sera infligé les peines proportionnées.
57. Nous établissons également qu'il ne sera envoyé d'aucune manière ni lettre ni quelque écrit que ce soit; même imprimé, aussi bien à ceux qui sont au conclave, sans en excepter les cardinaux électeurs, que surtout du conclave à ceux qui sont à l'extérieur, à moins que tous et chacun de ces écrits ne soient soumis d'abord à l'examen du secrétaire du conclave, ainsi que des prélats commis à la garde du conclave. On exceptera cependant de cette règle l'échange de lettres, qui sera libre et sans entrave, entre le tribunal de la Pénitencerie apostolique et le cardinal grand pénitencier résidant au conclave; ces lettres, munies du sceau de ce tribunal, ne seront soumises à aucun examen et inspection.
En outre nous interdisons expressément que des journaux quotidiens ou périodiques soient envoyés au conclave et hors du conclave.
58. Tous ceux qui sont de quelque manière au service du conclave devront éviter avec soin tout ce qui pourrait violer de quelque manière le secret, directement ou indirectement: paroles, écrits, signes ou toute autre chose, sous peine d'excommunication latae sententiae, réservée au Siège apostolique.
59. En particulier, nous interdisons aux cardinaux électeurs de révéler, à ceux qu'ils pourraient avoir à leur service ou à toute autre personne, des informations, qui concernent directement ou indirectement les votes, comme aussi tout ce qui a été traité ou décidé au sujet de l'élection du Pontife dans les réunions des cardinaux, aussi bien avant que pendant le conclave.
60. Nous ordonnons en outre aux cardinaux électeurs, graviter onerata ipsorum conscientia, de conserver aussi le secret de la même manière après l'élection du nouveau Pontife, se souvenant qu'il n'est permis de le violer en aucune façon, à moins qu'une permission particulière et expresse n'ait été concédée par le même Pontife. Nous voulons que cette obligation s'étende à tous ceux qui ont pris quelque part au conclave, au cas où ils auraient eu connaissance par hasard, de bonne ou mauvaise foi, de ce qui s'est passé au conclave.
61. Enfin, pour que les cardinaux électeurs puissent se garder de l'imprudence d'autrui aussi bien que des pièges qui pourraient être éventuellement tendus à leur indépendance de Jugement et à leur liberté de décision. Nous interdisons absolument d'introduire, sous quelque prétexte que ce soit, ou, s'il y en a peut-être déjà sur place, d'utiliser tout genre d'appareils qui servent à enregistrer, reproduire ou transmettre les voix et les images.
CHAPITRE V
LA FORME DE L'ÉLECTION
62. Le matin qui suit la clôture du conclave, au signal fixé, les cardinaux électeurs non empêchés par la maladie se réunissent dans la chapelle désignée où ils concélèbrent la sainte messe ou bien y assistent. Après la célébration et l'invocation au Saint-Esprit, on procède immédiatement à l'élection, qui doit être faite seulement d'une des trois manières ou formes indiquées ci-dessous, sans quoi l'élection doit être tenue pour nulle et non avenue, restant sauf ce qui est établi au numéro 76.
63. La première manière, que l'on peut appeler par acclamation ou par inspiration, est celle selon laquelle les cardinaux électeurs, comme inspirés par l'Esprit Saint, librement et spontanément. à l'unanimité et à haute voix, proclament quelqu'un souverain pontife. Cette forme cependant ne peut être utilisée qu'en conclave et après sa fermeture. Elle doit se faire au moyen de la parole eligo prononcée à voix intelligible ou exprimée par écrit si quelqu'un ne peut pas le prononcer. Il est requis en outre que cette forme d'élection soit acceptée conjointement par tous et par chacun des cardinaux électeurs présents au conclave, y compris ceux qui garderaient la chambre pour cause de maladie, sans désaccord par aucun et en veillant aussi à ce qu'aucune tractation spéciale sur le nom de la personne à élire n'ait eu lieu auparavant. Si donc, par exemple, un des cardinaux électeurs disait spontanément et sans aucune tractation particulière préalable: "Révérendissimes Pères, eu égard à la rare vertu et probité du révérendissime N. N., je jugerais qu'il faut l'élire comme souverain pontife et, dès maintenant, moi, je l'élis pour pape"; si ensuite les autres Pères sans exception, suivant le sentiment du premier, élisaient à l'unanimité, par le même mot eligo, prononcé à intelligible voix ou, si cela ne se peut, exprimé par écrit, le même homme sur lequel aucune tractation spéciale n'a eu lieu auparavant, ce même N. serait canoniquement élu selon cette forme d'élection.
64. La deuxième manière est appelée élection par compromis; elle a lieu quand, en certaines circonstances particulières, les cardinaux électeurs confient le pouvoir d'élire à quelques-uns d'entre eux pour qu'au nom de tous ils pourvoient l'Eglise catholique d'un Pasteur. Dans ce cas, tous et chacun des cardinaux électeurs présents dans le conclave fermé, sans qu'aucun d'eux ne soit d'un avis différent, décidant de procéder par compromis, confient l'élection à quelques-uns d'entre eux, qui seront en nombre impair, au moins neuf et au plus quinze; ils souscrivent, par exemple, à la formule suivante: "Au nom du Seigneur, Amen. L'an..., mois..., jour..., nous, cardinaux électeurs, tous et chacun présents au Conclave (tous doivent être nommés un à un) nous avons décrété et décrétons de procéder à l'élection par compromis; c'est pourquoi, à l'unanimité et en plein accord, sans aucun dissentiment, nous élisons comme compromissaires les Révérendissimes Pères N .N., N.N.... auxquels nous donnons plein pouvoir et facilité pour pourvoir la Sainte Eglise Romaine, d'un Pasteur, sous cette forme, c'est-à-dire...". Ici, il est nécessaire que les cardinaux électeurs qui recourent au compromis indiquent clairement le mode et la forme selon lesquels les compromissaires devront procéder à l'élection et ce qui est requis afin que l'élection soit valide, comme par exemple s'ils doivent d'abord proposer à tout le collège des électeurs la personne qu'ils veulent élire ou s'ils doivent faire l'élection directement; si tous les compromissaires doivent réunir leurs suffrages sur une seule personne ou si, au contraire, il suffit que les deux tiers s'accordent sur une personne; ou bien s'ils doivent élire quelqu'un du collège des électeurs ou s'ils peuvent aussi élire quelqu'un d'extérieur au collège, et autres choses semblables. Il faudra aussi indiquer le temps durant lequel les cardinaux électeurs veulent que les compromissaires aient le pouvoir d'élire; et ensuite, on ajoutera ces mots ou d'autres semblables: "Et nous promettons de regarder comme le Pontife romain celui que les compromissaires auront jugé devoir être élu selon la forme susdite".
Ayant reçu ce mandat ainsi que les prescriptions indiquées ci-dessus, les compromissaires s'assemblent dans un lieu isolé et clos et, afin qu'ils puissent en parler plus librement, ils doivent se donner clairement l'assurance qu'ils n'entendent pas donner leur consentement par n'importe quelle parole prononcée, mais seulement lorsqu'ils la mettent expressément par écrit. Une fois l'élection faite par les compromissaires selon la forme qui leur a été prescrite, et promulguée au conclave, celui qui a été élu par ce moyen est canoniquement et vraiment pape.
65. La troisième manière ou forme ordinaire d'élection du Pontife romain, est celle qu'on appelle par scrutin. En cette manière, nous confirmons pleinement la loi autrefois portée et observée religieusement depuis, par laquelle il a été établi que, pour l'élection valide du Pontife romain, sont requis les deux tiers des suffrages; pareillement, nous voulons aussi maintenir en vigueur la règle fixée par notre prédécesseur Pie XII, selon laquelle il est prescrit qu'aux deux tiers des suffrages soit toujours ajouté un autre suffrage (Cf. const. ap. Vacantis Apostolicae Sedis, n. 68: AAS 38, 1946, p. 87).
66. L'élection par scrutin se déroule en trois phases dont la première, qui peut s'appeler pré-scrutin, comprend: 1) la préparation et la distribution des bulletins de vote par les cérémoniaires, qui doivent en donner au moins deux ou trois à chaque cardinal électeur; 2) le tirage au sort, parmi l'ensemble des cardinaux électeurs, de trois scrutateurs, de trois délégués pour recueillir les votes des malades, nommés plus brièvement infirmiers, et de trois réviseurs; ce tirage au sort est fait publiquement par le dernier cardinal diacre; il tire dans l'ordre les neuf noms de ceux qui exerceront ces fonctions; 3) la rédaction des bulletins de vote, qui doit être accomplie secrètement par chacun des cardinaux électeurs, en écrivant, autant que possible d'une écriture qui ne puisse être facilement reconnue, le nom de celui qu'il élit, et en évitant d'écrire plusieurs noms sur le bulletin, car le vote serait nul: 4) le pliage des bulletins, qui se fait par le milieu de chaque bulletin, de manière que le bulletin lui-même soit réduit à peu près à la largeur d'un pouce.
67. Pour cette phase de l'élection par scrutin, on aura soin d'observer les normes suivantes: a) la forme du bulletin de vote doit être rectangulaire; sur la moitié supérieure, il contiendra ces mots, imprimés si possible: Eligo in Summum Pontificem; la moitié inférieure comportera un espace libre pour y écrire le nom de l'élu; le bulletin de vote sera disposé de manière qu'en le pliant les deux parties se recouvrent; b) si, dans le tirage au sort des scrutateurs, des infirmiers et des réviseurs, sortent les noms de cardinaux électeurs qui, pour cause de maladie ou de quelque autre empêchement, ne peuvent s'acquitter des charges susdites, les noms d'autres électeurs non empêchés seront tirés à leur place. Les trois dont les noms seront tirés les premiers feront office de scrutateurs, les trois suivants rempliront la charge d'infirmiers, les trois derniers celle de réviseurs; c) durant le vote, les cardinal» électeurs devront être seuls dans la chapelle; c'est pourquoi, aussitôt que les bulletins de vote auront été distribués et avant que les électeurs commencent à écrire dessus, le secrétaire du conclave, le maître des cérémonies pontificales et les cérémoniaires devront sortir de la salle. Après leur sortie, le dernier cardinal diacre ferme la porte, qu'il ouvrira et refermera toutes les fois que ce sera nécessaire, par exemple lorsque les infirmiers iront recueillir les votes des malades et ensuite lorsqu'ils reviendront à la chapelle.
68. La seconde phase, qui est le scrutin vraiment et proprement dit, comprend: 1) le dépôt des bulletins dans l'urne; 2) le mélange des bulletins et leur décompte; 3) le dépouillement du scrutin.
Chaque cardinal électeur selon l'ordre de préséance, après avoir écrit et plié son bulletin de vote, le porte, la main levée de telle sorte qu'il puisse être vu, à l'autel près duquel se tiennent les scrutateurs et sur lequel il y a une urne couverte d'un plateau pour recevoir les bulletins. Là, le cardinal électeur fera la génuflexion et priera un instant; puis il se lèvera et, à haute voix, prêtera serment sous cette forme: Je prends à témoin le Christ Seigneur, qui me jugera, que j'élis celui que, selon Dieu, je juge devoir être élu. Après cela, il posera le bulletin sur le plateau et, au moyen de celui-ci, il le mettra dans l'urne; cela fait, il s'inclinera vers l'autel et retournera à sa place. Si quelque cardinal électeur, parmi ceux qui sont présents dans la chapelle, ne peut se rendre à l'autel à cause de sa mauvaise santé, le dernier scrutateur s'approche de lui; et cet électeur, après avoir prêté le serment, susdit, donne son bulletin plié à ce scrutateur qui le porte ostensiblement à l'autel et, sans prière ni serment, le place sur le plateau et, par son moyen, le met dans l'urne.
69. S'il y a des cardinaux électeurs malades dans leurs chambres, les trois infirmiers se rendent auprès d'eux avec une boîte portant à sa partie supérieure une fente par où le bulletin de vote plié puisse être introduit; avant de remettre cette boîte aux infirmiers, les scrutateurs l'ouvriront publiquement, afin que les autres électeurs puissent constater qu'elle est vide, puis ils la fermeront et en déposeront la clé sur l'autel. Ensuite les infirmiers, avec la boîte fermée et un petit plateau contenant le nombre de bulletins suffisant, se rendent auprès de chacun des malades; ayant pris un bulletin, ce dernier devra l'écrire en secret, le plier et, après avoir prêté le serment déjà mentionné, il l'introduira par la fente dans la boite. Si un malade ne peut pas écrire, un des trois infirmiers ou un autre cardinal électeur, désigné par le malade, après avoir, entre les mains des infirmiers eux-mêmes, prêté le serment de garder le secret, fera ce qui a été indiqué ci-dessus. Ceci achevé, les infirmiers reporteront la boîte dans la chapelle; les scrutateurs l'ouvriront et compteront les bulletins qui y sont contenus; après avoir constaté qu'il y a autant de bulletins que de malades, ils les poseront un à un sur le plateau et, par son moyen, ils les mettront tous ensemble dans l'urne. Pour ne pas faire trop traîner en longueur le scrutin, les infirmiers pourront remplir leurs propres bulletins aussitôt après le premier des cardinaux et les mettre dans l'urne; puis, tandis que les autres électeurs procèdent au scrutin, ils se rendront chez les malades pour recueillir leurs votes de la manière qui vient d'être dite.
70. Lorsque tous les cardinaux électeurs auront glissé leur bulletin dans l'urne, le premier scrutateur agitera cette dernière plusieurs fois, afin de mélanger les bulletins; après quoi le dernier scrutateur les compte aussitôt, prenant ostentiblement chaque bulletin dans l'urne un par un et le déposant dans un vase vide préparé pour cela. Si le nombre des bulletins ne correspond pas au nombre des électeurs, il faut les brûler tous et recommencer aussitôt le vote; au contraire, si le nombre des bulletins correspond au nombre des électeurs, on procède alors au dépouillement du scrutin, qui se fait de la manière suivante.
71. Les scrutateurs sont assis à une table placée devant l'autel: le premier prend un bulletin, le déplie et, ayant vu sur ce bulletin le nom de l'élu, le passe au second scrutateur qui, de même, après avoir vu le nom de cet élu, passe le bulletin au troisième scrutateur, lequel le lit à haute et intelligible voix, pour que tous les électeurs présents puissent noter le suffrage sur une feuille préparée dans ce but. Il note aussi lui-même le nom lu sur le bulletin. Si dans le dépouillement du scrutin, les scrutateurs trouvent deux bulletins pliés de telle sorte qu'il apparaisse qu'ils n'ont été donnés que par un électeur, ces bulletins seront tenus pour un seul suffrage s'ils portent l'un et l'autre le nom d'un seul et même élu; si au contraire ils portent des noms différents, aucun des deux suffrages n'est valide; cependant, le scrutin n'est vicié dans aucun des deux cas.
Le dépouillement du scrutin étant achevé, les scrutateurs font la somme des votes obtenus par les divers noms et les notent sur une feuille séparée.
Le dernier scrutateur perfore chaque bulletin, après l'avoir lu, avec une aiguille munie d'un fil, à l'endroit où se trouve le mot eligo, et il enfile ainsi tous les bulletins afin de les conserver plus sûrement. A la fin de la lecture des noms les extrémités du fil sont liées par un nœud et tous les bulletins ainsi réunis sont placés dans l'ume vide ou sur le coin de la table.
72. Vient alors la troisième et dernière phase, appelée aussi post-scrutin, qui comprend: 1) le comptage des votes; 2) leur vérification; 3) la combustion des bulletins.
Les scrutateurs feront le total des votes obtenus par chacun et, si personne n'a atteint les deux tiers des suffrages plus un, il n'y a pas de Pape élu à ce scrutin; au contraire, si quelqu'un recueille les deux tiers des suffrages plus un, il y a élection du Pontife romain et elle est canoniquement valide.
Que l'élection soit faite ou non, les réviseurs doivent contrôler aussi bien les bulletins de vote que les relevés des suffrages établis par les scrutateurs, afin de s'assurer que ces derniers ont accompli leur charge avec soin et fidélité.
Aussitôt après la vérification, avant que les cardinaux électeurs ne quittent la salle, tous les bulletins sont brûlés par les scrutateurs, avec l'aide du secrétaire du conclave et des cérémonialres, rappelés entre temps par le dernier cardinal diacre. Si toutefois on devait procéder immédiatement à un deuxième scrutin, les bulletins du premier scrutin seront brûlés seulement à la fin, en même temps que ceux du deuxième scrutin.
73. Nous ordonnons à tous et à chacun des cardinaux électeurs, afin de sauvegarder plus sûrement le secret, de remettre au cardinal camerlingue ou à l'un des trois cardinaux assistants, pour qu'elles soient brûlées en même temps que les bulletins de vote, toutes les notes de quelque genre que ce soit qu'ils auraient prises sur le résultat de chaque scrutin.
Nous décidons en outre que, à la fin du conclave le cardinal camerlingue de la Sainte Eglise Romaine établira un compte rendu, approuvé aussi par les trois cardinaux assistants, qui indiquera les résultats des votes intervenus au cours de chaque session. Ce rapport, conservé aux archives, devra être placé dans une enveloppe scellée qui ne pourra être ouverte par personne à moins que le Souverain Pontife ne le permette explicitement.
74. Confirmant ce qu'ont établi nos prédécesseurs St Pie X (Cf. const. ap. Vacante Sede Apostolica, n. 76: Pii X Pontificis Maximi, Acta, III, pp. 280-81). et Pie XII (Cf. const. ap. Vacantis Apostolicae Sedis, n. 88: AAS 38, 1946, p. 93), nous prescrivons que, le matin comme l'après-midi, si l'élection n'est pas obtenue à l'issue du scrutin, les cardinaux électeurs procéderont aussitôt à un nouveau scrutin dans lequel ils exprimeront de nouveau leurs suffrages, sans tenir compte de ceux qui ont été donnés dans le premier scrutin. Dans ce second scrutin, on observera les mêmes formalités que dans le premier, sauf que les électeurs ne sont pas tenus de prêter serment à nouveau, ni d'élire de nouveaux scrutateurs, infirmiers et réviseurs: ce qui a été fait sur ces points dans le premier scrutin vaut aussi pour le second.
75. Toutes les règles exposées ci-dessus au sujet des formalités du scrutin seront soigneusement observées par les cardinaux électeurs au cours de tous les scrutins, qui devront avoir lieu chaque jour, le matin et l'après-midi, après la célébration de la messe ou des prières prévues par l'Ordo sacrorum rituum Conclavis.
76. Au cas où les cardinaux électeurs auraient des difficultés à s'accorder sur la personne à élire, alors, après que les scrutins aient été accomplis sans résultat pendant trois jours selon la forme décrite aux nn. 65 et suivants, les scrutins sont suspendus pendant un jour tout au plus pour que des prières soient adressées à Dieu, que les électeurs puissent parler librement entre eux et qu'une brève exhortation spirituelle soit faite par le premier des cardinaux diacres. Puis on reprend les scrutins selon la même procédure et, à moins que l'élection n'intervienne, on en fait sept. Ensuite on fait une autre pause pour laisser place à la prière, aux entretiens et à une exhortation faite par le premier des cardinaux prêtres. On procède ensuite éventuellement à une autre série de sept scrutins selon la même procédure; s'il n'y a pas encore eu de résultat, de nouveau on se livre à la prière et aux entretiens, et une exhortation est faite aux électeurs par le premier des cardinaux évêques. A ce stade, le cardinal camerlingue de la Sainte Eglise Romaine consultera les électeurs sur la manière de procéder. On ne s'éloignera pas du principe habituel selon lequel les deux tiers des suffrages plus un sont exigés pour un scrutin efficace, à moins que tous les cardinaux électeurs, à l'unanimité, c'est-à-dire sans aucune exception, ne se prononcent pour un principe différent qui peut consister dans le compromis (cf. N. 64), ou dans la majorité absolue des voix plus une, ou dans une élection qui se fait seulement entre les deux qui ont obtenu le plus grand nombre de suffrages au scrutin précédant immédiatement.
77. Si l'élection était faite d'une autre manière que les trois décrites ci-dessus (cf. nn. 63 et suivants), ou si l'on n'a pas respecté les conditions fixées pour chacune d'elles, elle est par le fait même nulle et non avenue (cf. n. 62) sans qu'il y ait besoin d'aucune déclaration, et elle ne donne donc aucun droit à celui qui aurait été élu d'une telle façon.
78. Tout ce qui a été dit jusqu'ici, tant pour ce qui précède l'élection que pour l'élection elle-même du Pontife romain, nous déclarons qu'il faudra l'observer, même s'il arrive que la vacance du Siège apostolique se produise par renonciation du Souverain Pontife à sa charge.
CHAPITRE VI
CE QUI DOIT ÊTRE OBSERVÉ OU ÉVITÉ
DANS L'ÉLECTION DU PONTIFE ROMAIN
79. Nous aussi, comme nos prédécesseurs, nous réprouvons et condamnons le détestable crime de simonie dans l'élection du Pontife romain, et nous frappons d'excommunication latae sententiae tous ceux qui s'en rendraient coupables; mais nous confirmons également la décision de notre prédécesseurs St Pie X, selon laquelle a été supprimée la nullité de l'élection simoniaque établie par Jules II ou tout autre décret pontifical, afin que la valeur de l'élection du Pontife romain ne soit pas mise en cause pour cette raison (cf. const. ap. Vacante Sede Apostolica, n. 79; PU X Pontificis Maximi Acta, III, p. 282),pour l'élection du Souverain Pontife
80. De même, confirmant les prescriptions de nos prédécesseurs, nous interdisons à quiconque, fût-il revêtu de la dignité cardinalice, d'oser, tandis que le Pontife est vivant et sans l'avoir consulté, délibérer de l'élection de son successeur, promettre des voix ou décider quoi que ce soit à ce sujet dans des réunions privées.
81. Nous voulons confirmer aussi ce qui fut sanctionné par nos prédécesseurs afin d'exclure toute intervention extérieure dans l'élection du Souverain Pontife. C'est pourquoi de nouveau, en vertu de la sainte obéissance et sous peine d'excommunication latae sententiae, nous interdisons à tous et à chacun des cardinaux électeurs, tant présents que futurs, et également au secrétaire du conclave et à toutes les autres personnes ayant part au conclave, d'accepter sous aucun prétexte, de n'importe quel pouvoir civil, la mission de proposer un veto ou exclusive, même sous forme d'un simple désir, et de faire part de ce veto soit à tout le collège des électeurs réuni, soit à chacun des électeurs, soit par écrit soit oralement soit directement et de façon immédiate, soit indirectement et par intermédiaire, soit avant le conclave soit pendant sa tenue. Nous voulons que cette interdiction s'étende à toutes les ingérences, oppositions désirs par lesquels des autorités civiles de quelque ordre et de quelque degré que ce soit, ou n'importe quel groupe, ou des personnes, voudraient s'immiscer dans l'élection du Pontife.
82. Qu'en outre les cardinaux électeurs s'abstiennent de toute espèce de pactes, d'accords de promesses et autres engagements qui les contraindraient à donner ou refuser leur vote à un ou plusieurs candidats. Si ces choses se produisaient de fait, même sous serment, nous décrétons qu'elles sont nulles et non avenues et que personne n'est tenu de les observer; et dès à présent nous frappons les transgresseurs d'excommunication latae sententiae. Cependant nous n'entendons pas interdire les pourparlers en vue de l'élection durant la vacance du Siège apostolique.
83. Pareillement, nous interdisons aux cardinaux d'établir des accords avant l'élection, ou bien de prendre, par une entente commune, des engagements qu'ils s'obligeraient à respecter s'ils accédaient au pontificat. Si de tels accords se réalisaient en fait, nous les déclarons également nuls et non avenus, si l'on s'y est engagé par serment.
84. Dans les mêmes termes que nos prédécesseurs, nous exhortons vivement les cardinaux électeurs à ne pas se laisser guider, dans l'élection du Pontife par la sympathie ou l'aversion, influencer par la faveur ou le respect de quiconque, pousser par l'intervention de personnalités en vue ou de groupes de pression, par l'emprise des moyens de communication sociale, par la violence, par la crainte, par la recherche de la popularité; mais, ayant devant les yeux uniquement la gloire de Dieu et le bien de l'Eglise, après avoir imploré l'aide divine, qu'ils donnent leur voix à celui qu'ils jugeront plus capable que les autres de gouverner l'Eglise avec fruit et utilité.
85. Pendant le conclave, l'Eglise est unie de manière toute particulière à ses Pasteurs et spécialement aux cardinaux électeurs du Souverain Pontife et elle implore de Dieu un nouveau chef comme un don de sa bonté et de sa providence. En effet, comme la première communauté chrétienne dont il est question dans les Actes des Apôtres (Cf. Ac 1, 14), l'Eglise universelle, rassemblée spirituellement autour de Marie, Mère de Jésus, doit persévérer unanimement dans la prière; ainsi l'élection du nouveau Pontife ne sera pas quelque chose d'étranger au peuple de Dieu et de réservé au seul collège des électeurs, mais sera comme une action de toute l'Eglise. En conséquence, nous établissons que dans toutes les villes et autres lieux, au moins les plus importants, après la nouvelle de la mort du Pape et la célébration de services solennels à son intention, on élève des prières humbles et assidues vers le Seigneur pour qu'il éclaire les électeurs et réalise si bien leur accord dans l'élection que cette dernière soit rapide, unanime, et utile, comme l'exige le salut des âmes et le requiert le bien du monde catholique.
86. Enfin, nous prions celui qui sera élu comme notre successeur de ne pas se dérober à la charge à laquelle il est appelé, par crainte de son poids, mais de se soumettre humblement au dessein de la volonté divine. Car Dieu qui impose la charge y met aussi la main lui-même pour que l'élu ne soit pas incapable de la porter; en effet, celui qui donne la fonction est aussi lui-même l'auxiliaire de la gestion; et de crainte que la faiblesse de l'élu ne succombe sous le poids de la charge, celui qui a conféré la dignité donne la force.
CHAPITRE VII
ACCEPTATION ET PROCLAMATION DE L'ÉLECTION
COURONNEMENT DU NOUVEAU PONTIFE
87. L'élection ayant eu lieu canoniquement, le dernier des cardinaux diacres appelle dans la salle du conclave le secrétaire du conclave, le maître des cérémonies pontificales et les cérémoniaires; ensuite, le cardinal doyen ou le premier des cardinaux par l'ordre et par l'âge, au nom de tout le collège des électeurs, doit demander le consentement de l'élu en ces termes: Acceptez-vous l'élection qui vient d'être faite canoniquement de votre personne comme Souverain Pontife? Et aussitôt, après que le consentement a été donné, il lui demande: De quel nom voulez-vous être appelé?
Alors, le procès-verbal de l'acceptation du nouveau Pontife et du nom qu'il a pris est rédigé par le maître des cérémonies pontificales faisant fonction de notaire et ayant comme témoins deux cérémoniaires.
88. Après l'acceptation, l'élu qui a déjà reçu l'ordination épiscopale est immédiatement évêque de l'Eglise de Rome et en même temps vrai Pape et chef du collège épiscopal; il acquiert en acte et peut exercer le pouvoir plein et absolu sur l'Eglise universelle. Si l'élu n'a pas le caractère épiscopal, il doit aussitôt être ordonné évêque.
89. Ensuite, une fois accomplies les formalités habituelles conformément à l'Ordo sacrorum rituum Conclavis, les cardinaux électeurs s'avancent selon les règles fixées pour rendre hommage au Souverain Pontife nouvellement élu et faire acte d'obéissance. Puis on rend grâces à Dieu; après quoi, le premier des cardinaux diacres annonce au peuple, dans l'attente le nom du nouveau Pontife qui, aussitôt après, donne la bénédiction apostolique Urbi et Orbi.
Si l'élu n'a pas le caractère épiscopal, l'hommage lui est rendu et l'annonce est faite au peuple seulement après qu'il aura été ordonné évêque.
90. Si l'élu se trouve hors du conclave, il faut observer les règles contenues dans l'Ordo sacrorum rituum Conclavis.
L'ordination épiscopale du Souverain Pontife élu qui n'est pas encore évêque, dont il est question aux nn. 88 et 89 sera faite de more Ecclesiae par le doyen du Sacré Collège des cardinaux ou, en son absence, par le vice-doyen ou, si celui-ci est lui-même empêché, par le plus ancien des cardinaux évêques.
91. Nous établissons que le conclave prend fin, en ce qui concerne les effets canoniques mentionnés au n. 6 aussitôt après que le nouveau Pontife a été élu et a donné son consentement à son élection, et, s'il n'a pas le caractère épiscopal après qu'il a été ordonné évêque (cf. nn. 88 et 89). C'est pourquoi nous décrétons qu'à partir de ce moment, le substitut de la Secrétairerie d'Etat ou secrétariat du Pape, le secrétaire du Conseil pour les Affaires publiques de l'Eglise, le préfet de la Maison du Pape et quiconque doit traiter avec le Souverain Pontife élu des choses qu'il est nécessaire de lui présenter, peuvent se rendre auprès de lui.
92. Enfin, le Souverain Pontife est couronné par le premier cardinal diacre, et, dans un délai convenable, il prend possession de l'archibasilique patriarcale du Latran selon le rite prescrit.
*ORLF, Edition hebdomadaire du 15 août 1978, p 9, 10 et 11
Date de dernière mise à jour : 2017-02-23
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