Lettre pastorale de Mgr Hubert Coppenrath sur Jésus 2011
Jésus, seul Sauveur, seul Seigneur
À tous les fidèles du diocèse de Papeete, grâce et paix de la part de Dieu,
notre Père et de notre Sauveur et Seigneur Jésus-Christ.
"Qui n'est pas avec moi est contre moi ; et qui ne rassemble pas avec moi disperse" (Mt 12,30)
L'année dernière, le thème pastoral de notre diocèse était "la réconciliation" et nous nous sommes rappelés que Jésus-Christ est venu pour nous réconcilier avec Dieu, avec nous-mêmes et avec les autres. Il nous libère du péché qui met un obstacle à la communion entre Dieu et nous et ainsi il nous sauve de la mort éternelle.
"Dieu, en effet, a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils, son unique, afin que tout homme qui croit en lui ne périsse pas, mais obtienne la vie éternelle" (Jn 3,16).
Cependant la citation de Matthieu 12,30 placée en tête de cette lettre pastorale nous rappelle que Jésus ne peut nous sauver que si nous nous confions entièrement et totalement à lui. Il ne peut partager avec personne son rôle de Sauveur. "Ne vous faites pas appeler guides car vous n'avez qu'un seul guide, le Christ" (Mt 23,10).
Tentations de relativisme
Il y a quelques années, l'Église a dû rappeler dans la déclaration "Dominus Jesus" qu'il n'y a qu'un seul sauveur. En effet certains théologiens avaient émis l'hypothèse que Dieu a envoyé à plusieurs reprises dans l'Histoire du monde des sauveurs et que Jésus-Christ n'est que l'un d'eux. En conséquence, on pouvait être sauvé en suivant au choix l'un de ces sauveurs. Le Christ était ainsi mis sur un pied d'égalité avec un certain nombre de grands personnages religieux tels que Bouddha.
En Polynésie, certains intellectuels ont entrepris de restaurer le culte des anciens dieux. Cela se situe dans une recherche d'un mode de vie plus conforme à la culture maohi. Cependant, il n'est pas possible aujourd'hui de restaurer intégralement l'ancien culte, qui comportait des actes barbares comme les sacrifices humains ; aussi le néo paganisme qui nous est proposé est tout a fait édulcoré par rapport au culte des anciens dieux tel qu'il se pratiquait avant l'arrivée des Européens et bien qu'il s'en défende, il est influencé par le christianisme.
D'autres, sans vouloir substituer un culte ancien rénové au christianisme, empruntent à ce culte un vocabulaire pour habiller leur foi chrétienne. On appelle Dieu : "Te Tumu" ; on traduit le mot "créer" par "rahu" sans se soucier de la différence entre un concept qui signifie "faire de rien" et un autre qui signifie "accomplir par magie".
Notre attitude à l'égard du culte qui a été pratiqué par nos ancêtres doit être le respect car, malgré ses déficiences, il a constitué une pierre d'attente jusqu'à ce que la Révélation parvienne jusqu'à nos rivages. D'autre part si les Polynésiens d'aujourd'hui ont une mentalité religieuse, c'est qu'ils héritent d'une culture religieuse qui a été entretenue par l'adoration qui était pratiquée sur les "marae".
Cependant, les premiers convertis au christianisme, issus pour la plupart du milieu sacerdotal ou des "arioi", ont bien vu les insuffisances d'une religion fondée sur la peur plutôt que sur l'amour. Lorsque le grand prêtre Patii a brisé ses idoles sur le marae de Papetoai en 1813, il a voulu faire un geste fort pour bien marquer que les dieux qu'il avait adorés jusqu'alors étaient des dieux morts, incapables d'apporter le salut.
La religion n'est pas une affaire de snobisme. Le croyant est à la recherche de la vérité, une vérité qui rend libre et qui sauve. Aussi, malgré tout le respect et l'intérêt que nous devons avoir pour le culte de nos ancêtres, nous ne pouvons y rechercher quelque chose qui viendrait s'ajouter ou compléter notre foi chrétienne.
Les religions et les sagesses orientales exercent un attrait sur certains de nos contemporains nés dans le christianisme, d'où la tentation de rechercher dans ces sagesses une sorte de complément à la foi chrétienne. Nous pouvons admirer ces sagesses et reconnaître tout ce qu'elles apportent aux peuples qui se sont nourris de ces sagesses, admirer certaines personnalités représentatives de ces sagesses comme le Dallai Lama. Mais on ne peut être à la fois Chrétien et Bouddhiste. Dans le christianisme, nous avons affaire à un Dieu personnel qui nous apporte lesalut par sa grâce et le salut est une communion à sa plénitude. Dans le bouddhisme, il n'y a pas de Dieu personnel et le salut est obtenu par les efforts accomplis par chaque personne et se trouve dans le non-être.
Il fut un temps où beaucoup de chrétiens se voulaient aussi marxistes et la pensée marxiste a inspiré des intellectuels abusés par la propagande communiste. Ce fut le cas, en particulier des "théologies de libération" qui ont fleuri en Amérique du Sud. On pensait qu'avant de proposer aux couches les plus pauvres de la population la doctrine chrétienne, il fallait d'abord les aider à faire la révolution, à briser l'injustice dont ils étaient victimes. Un des résultats de cette aberration a été qu'une partie des masses populaires se sont tournées vers les sectes qui au moins leur parlaient de Jésus. Mais la perversité du marxisme et tous les crimes qu'il a inspirés ont fini par ouvrir les yeux même des intellectuels les plus aveugles et cette mode est en voie de forte régression.
Mais la déviation la plus répandue c'est de vouloir être Chrétien tout en faisant une part à l'esprit du monde. Si l'on rencontre beaucoup de gens qui, tout en se disant Chrétiens, sont imprégnés de New Age, de bouddhisme ou d'autres spiritualités orientales, on rencontre surtout des gens qui font une part dans leur vie à ce qui est du "monde" tout en acceptant quelques valeurs chrétiennes. Ces gens-là ne sont pas disciples de Jésus et ne sont pas dans la vérité de Jésus. Jésus "vomit les tièdes" (Apo 3,16), c'est-à-dire les gens qui le suivent à moitié. La sagesse du monde et la sagesse de Jésus ne sont pas compatibles : "C'est bien une sagesse que nous enseignons aux Chrétiens confirmés mais ce n'est pas la sagesse de ce monde" (1 Co 2,6).
Le Christ, seul Sauveur
Ainsi on ne peut être disciple de Jésus qu'en étant convaincu qu'il est le seul Sauveur et qu'il ne peut partager avec personne cette fonction. Il est le sauveur de notre personne tout entière. Pour accéder au salut, qu'il est seul à pouvoir nous procurer, il faut accepter l'intégralité de son enseignement. Il est donc notre seul maître à penser. Nous trouvons cet enseignement dans le Nouveau Testament, mais aussi dans la tradition non écrite. Cette tradition non écrite comprend en particulier la liste des écritures inspirées de l'Ancien et du Nouveau Testament et aussi la manière dont s'est effectuée la succession apostolique.
Ainsi, nous sommes sauvés par la foi en Jésus Christ et en tout ce qu'il a révélé. "Celui qui croira et sera baptisé sera sauvé, celui qui ne croira pas sera condamné" (Mc 16,16). Mais cette foi est une obéissance, c'est-à-dire qu'elle nous conduit à l'obéissance aux commandements de notre Sauveur et à la soumission à sa volonté. "Tout Fils qu'il était, il apprit par ses souffrances l'obéissance, et, conduit jusqu'à son propre accomplissement, il devint pour tous ceux qui lui obéissent cause de salut éternel." (Hébreux 5,8-9)
Nous devons donc au Christ une obéissance et une soumission totale. Aucune autorité humaine ne peut prétendre se situer au-dessus de celle du Christ. C'est la raison pour laquelle les chrétiens sont entrés en conflit avec le pouvoir impérial, c'est la raison pour laquelle les chrétiens sont persécutés périodiquement par des régimes qui veulent mettre l'autorité de l'État au-dessus de toute autre autorité. Nous devons donc être prêts à refuser les prétentions de ceux qui voudraient mettre des autorités humaines au-dessus de celle du Christ.
Accueillir personnellement le salut
Cependant l'obéissance que le Christ attend de nous n'est pas une obéissance de crainte, mais une obéissance de confiance et d'amour. "Si vous m'aimez, vous vous appliquerez à observer mes commandements …" (Jn 14,15) "Celui qui a mes commandements et les observent, celui-là m'aime." (Jn 14,21)
C'est pourquoi, si le Christ est Sauveur, il est aussi Seigneur, celui sous l'autorité duquel nous devons nous placer pour être sauvé. Mais en disant que Jésus est Seigneur, nous affirmons aussi qu'il est le Maître de l'univers. Tout pouvoir lui a été donné au ciel et sur la terre (Mt 28,18). Et Philippiens (2,9-11) nous dit "C'est pourquoi Dieu l'a souverainement élevé et lui a conféré le nom qui est au-dessus de tout nom afin qu'au nom de Jésus tout genou fléchisse, dans les cieux, sur la terre et sous la terre et que toute langue confesse que le Seigneur, c'est Jésus-Christ, à la gloire de Dieu le Père". Dieu a voulu "réunir l'univers tout entier sous un seul chef, le Christ" (Ep. 1,10).
En nous plaçant sous la Seigneurie de Jésus-Christ, nous sommes appelés à construire avec lui son royaume en annonçant le salut par le Christ et en devenant par notre vie ses témoins en ce monde. Chacun de nous doit prendre sa part de la mission confiée par Jésus à son Église. Il est "avec nous tous les jours jusqu'à la fin du monde" (Mt 28,20) et il continue d'agir dans le monde directement, mais aussi par nous, en nous demandant d'être sa bouche, ses mains, ses pieds et son cœur.
Conclusion
L'effort qui nous est proposé cette année consiste donc à vérifier que nous n'attendons le salut de nul autre que Jésus-Christ. Son enseignement n'a besoin d'être complété par aucune autre doctrine et, par sa mort et sa résurrection, il nous a obtenu un salut définitif et total. Par contre, toutes les pratiques qui manifestent la recherche d'un appui auprès d'une autre divinité, tous les comportements qui manifestent la recherche d'une protection spirituelle autre que la sienne sont offensants pour lui et nous font perdre au moins une partie de l'aide que Jésus pourrait nous apporter. Il nous est demandé aussi de nous placer totalement sous la Seigneurie de Jésus en accueillant ses commandements avec confiance, en nous laissant guider par sa parole et nous efforçant de faire toutes nos actions par amour pour lui. La Vierge Marie, par son exemple, par sa prière, par l'attrait mystérieux de sa pureté et de sa sainteté nous aidera à être de vrais disciples de Jésus, sans compromissions et sans infidélités.
Fait à Papeete le 8 décembre 2010, en la fête de l'Immaculée Conception de la Bienheureuse Vierge Marie
+ Hubert Coppenrath
Archevêque de Papeete
Date de dernière mise à jour : 2017-03-16
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