St Paul de la croix / prière
(Vie de Saint Paul de la Croix par Saint Vincent Marie Strambi)
CHAPITRE 10.
DU DON D’ORAISON QUE POSSEDAIT LE SERVITEUR DE DIEU. EXCELLENTS AVIS QU’IL DONNAIT AU SUJET DE L’ORAISON.
Le Maître intérieur qui enseignait au père Paul des leçons si sublimes, c’était l’oraison. C’est à cette fournaise céleste qu’il s’enflammait de l’amour de Dieu qui est, dit l’Apôtre, un foyer inextinguible de charité. ….. (Hebr. XII). Il avait pour elle un attrait remarquable ; il s’y adonnait tout entier, ….. Enfin on ne peut dire combien il était affectionné à ce saint exercice ; il y trouvait sa force, son repos, son trésor. Dès sa jeunesse, il avait coutume de se lever la nuit et de se rendre pieds nus avec son frère Jean-Baptiste dans un oratoire ; il y récitait l’office divin et s’entretenait pendant le silence de la nuit avec la divine Majesté. Depuis lors on peut dire que l’oraison fut son occupation continuelle, et que sa vie fut une union continuelle avec Dieu. Outre le temps qu’il consacrait à l’oraison avec la communauté, il se levait le matin avant les autres pour prier plus longtemps, ou pour se préparer à dire la sainte messe, s’occupant de bonne heure à exciter dans son cœur de nouveaux sentiments d’amour et de désir envers Jésus-Christ. Avait-il un instant de loisir ? Il en profitait avec empressement pour s’unir de plus en plus à Dieu et se plonger dans cet océan de bonté. C’est pour cela qu’il aimait à être seul. S’il était obligé de sortir, il se hâtait de rentrer au plus tôt afin de jouir en paix de son Dieu. Le temps de ses maladies était un temps précieux pour lui ; son recueillement était continuel ; il restait volontiers seul et tenait ses croisées fermées, passant des heures entières à réciter des prières vocales, ou à s’entretenir dans le silence et le recueillement avec son Dieu. Aussi l’infirmier lui disait-il souvent : « Vous êtes toujours en prière. – C’est là du moins mon intention, lui répondait le père. » L’infirmier qui a déposé sur ce point, ajoute : « Bien souvent j’entrais dans sa chambre, sans qu’il me vît, et je le trouvais profondément recueilli. Lorsque je l’appelais, il paraissait se réveiller d’un profond sommeil. Je lui disais à dessein : je suis fâché de vous avoir éveillé. – Je ne dors pas, me répondait-il, mais c’est mon habitude d’être ainsi. C’est-à-dire que son habitude était de se tenir en oraison. »
Pour savoir au juste quel était le don d’oraison du père Paul, il convient d’entendre son confesseur. …... Voici donc ce que dit son confesseur : « Dès le principe de sa conversion, le Seigneur, comme il me l’a avoué plusieurs fois, lui accorda un don d’oraison très spécial ; il se sentait tellement ravi en Dieu qu’il ne s’en serait jamais détaché… Souvent il se sentait ravi hors de lui-même et avait des extases sublimes ; c’est ce qui fit dire un jour à un bon frère capucin : Monsieur Paul, à ce que je vois, vous voulez aller en paradis. Dès les commencements, il s’appliqua à méditer la passion et la vie de Jésus-Christ ; cette méditation produisait en lui une componction, une abondance de sentiments et de larmes, difficile à décrire. Le Seigneur, pour s’accommoder à sa capacité, lui donnait fréquemment dans ces commencements des vues sensibles sur les mystères de sa vie et de sa passion ; il en vint à se faire voir à lui sous la forme d’un gracieux enfant, pendant qu’il récitait le saint Rosaire. Mais il ne tarda pas à le sevrer de ces faveurs sensibles pour lui en accorder de plus spirituelles et de plus éloignées des sens. Les visions devinrent intellectuelles. Le Seigneur les répandait en forme d’empreinte, à peu près comme la figure d’un cachet s’imprime dans la cire molle ; et dans ces communications, il lui faisait entendre tant et de si grandes vérités sur les mystères de la foi, que selon ce que Paul disait à son directeur d’alors, une bibliothèque de livres n’eût pas suffi pour les expliquer. Telle est sans doute l’origine de cette science céleste des choses de Dieu, dont il était rempli, et qu’il savait si bien communiquer aux autres. Outre les vérités de la foi, le Seigneur lui révéla les épreuves auxquelles il le destinait, et la grande œuvre de la congrégation, pour l’établissement de laquelle il l’avait choisi. Par suite de ces lumières et de ces grâces célestes, Paul se sentit tant de force et de courage qu’il aurait passé au travers des haches et des épées. …… La Bonté divine continua pendant l’espace d’environ douze ans à répandre sur lui le baume et l’onction de sa miséricorde. De temps en temps néanmoins, pour le façonner peu à peu au combat, elle le visitait par des sécheresses et de grandes désolations ; mais elles n’étaient ni aussi fréquentes, ni aussi longues. Depuis, ce grand Dieu qui se joue dans l’univers voulut se jouer amoureusement de son serviteur, en le laissant le reste de sa vie, c’est-à-dire, environ cinquante ans, dans les délaissements, les sécheresses, les désolations intérieures les plus horribles, ne lui donnant plus, qu’à de rares intervalles, quelques moments fort courts de relâche. Dans ces moments, on l’eût pris pour un séraphin ; il parlait alors avec tant de feu et d’ardeur des choses célestes, que ses auditeurs en étaient transportés ; lui-même, après cette trêve, se sentait rempli de force et de courage pour souffrir avec une générosité héroïque son martyre intérieur. Étant au plus fort de ses ténèbres, il disait après avoir rendu compte de son intérieur : « Bien que je me trouve dans un état si misérable, qu’il me semble ne plus avoir ni foi, ni espérance, ni charité, ni même cette lumière naturelle dont jouissent les autres hommes, et qu’ainsi je sois tout semblable à un animal ; malgré cela, si l’on me demandait à tout moment : à quoi penses-tu ? Il me semblerait pouvoir répondre que j’ai Dieu seul en vue dans la partie supérieure de l’âme. » De là on peut conclure que son oraison était continuelle, et d’autant plus noble, plus parfaite et plus sublime, qu’elle était plus cachée, plus secrète et plus dégagée de tout ce qui est sensible. ……
Toujours occupé de l’oraison, il devait en être un excellent maître, et l’on ne doit pas être surpris s’il parlait si bien de ce saint exercice et de la manière de le bien pratiquer. …... Pour en inspirer l’amour à tout le monde, il ne se lassait pas de répéter que par l’oraison l’âme s’unit à Dieu et se transforme en lui par amour. En parlant de la sorte, il exprimait le plus ardent désir de pouvoir s’abîmer totalement en Dieu, et le feu de son visage décelait le feu plus ardent encore qui consumait son cœur. Il eût souhaité que tout le monde s’appliquât à l’oraison et à la prière. Il était pour ainsi dire inconsolable de ce qu’il y en a si peu qui connaissent le trésor caché dans l’oraison et l’union avec Dieu, et il était persuadé qu’on entre aisément dans la voie de la perdition, quand on néglige l’oraison.
…… Afin de les disposer à cette grâce, et de leur en faire conserver le fruit, il leur recommandait particulièrement de se maintenir en la présence de Dieu, non pas par une étude sèche et stérile, mais d’une manière affectueuse, paisible et tranquille, pour se pénétrer de son esprit. Il inculquait cette pratique comme un moyen très puissant pour établir entre Dieu et l’âme une sainte union de charité. ……..
Mais la négligence perd les plus précieux trésors et dissipe le recueillement le plus profond. C’est pourquoi il recommandait instamment aux âmes favorisées de ces dons de se comporter avec beaucoup de prudence et de circonspection, de conserver avec soin le recueillement intérieur au milieu même des occupations, en faisant des retours fréquents vers Dieu. Il leur recommandait de même de veiller sur leurs sens et surtout sur les yeux ; car, disait-il, quand on se tient sur la porte et aux fenêtres de la maison, on voit bien ce qui se passe au dehors, mais non ce qui se passe au-dedans ; au contraire, quand on se tient dans l’intérieur de la maison, rien de ce qui s’y fait ne nous échappe. « Celui-là, ajoutait-il, qui s’applique à la modestie des yeux, acquerra le recueillement intérieur. »
……..Nous l’avons dit, il était ennemi des scrupules qui troublent tant l’esprit et empêchent de goûter la suavité des commandements divins. A son avis, il fallait les consumer tous dans le feu de la charité : « Abîmez-vous tout en Dieu, disait-il, et reposez votre esprit dans le sein de votre Père céleste. » Comme remède aux troubles et aux inquiétudes de l’âme, il recommandait d’invoquer le saint nom de Jésus, …… »
C’est surtout dans sa correspondance qu’on voit la grande habileté qu’il avait acquise dans la science des Saints, science qu’il puisait sans relâche aux pieds de Jésus crucifié. Ses lettres sont un monument d’autant plus précieux qu’elles nous ont conservé non seulement ses sentiments, mais ses paroles mêmes. Il avait pour maxime, qu’il faut proportionner les aliments à l’estomac ; aussi donnait-il à chacun les avis appropriés à ses dispositions. … A mesure qu’on marchait dans les voies de l’oraison et de la vertu, il donnait avec discrétion les instructions les plus propres à faire avancer. …..Il n’y avait point d’âmes si élevées à qui le serviteur de Dieu ne fût en état de donner les avis et les instructions les plus sublimes pour se diriger dans l’oraison et pour communiquer intimement avec Dieu ; il possédait à fond la théologie mystique. ….
« Les vrais adorateurs, lisons-nous dans une de ces lettres, adorent le Père en esprit et en vérité. Notez bien cela, parce que ces paroles de Jésus-Christ contiennent tout ce qu’il y a de plus parfait dans l’oraison : sa perfection ne consiste pas dans des joies et des délectations sensibles, mais dans l’esprit et la vérité, c’est-à-dire dans une vraie, pure et très simple nudité et pauvreté d’esprit, avec détachement de toute consolation sensible, en sorte que l’esprit se repose purement et simplement dans l’Esprit infini de Dieu. Notre Seigneur ajoute : et en vérité, c’est-à-dire, qu’il faut se tenir dans son néant pur et simple, sans rien dérober à Dieu. »
Il écrivait à une autre personne pieuse : « Quand vous vous serez bien anéantie, bien méprisée, bien abaissée dans votre néant, demandez à Jésus la permission d’entrer dans son cœur divin, et vous l’obtiendrez sur-le-champ. Là, placez-vous comme une victime sur cet autel divin, où brûle toujours le feu du saint amour ; laissez-vous pénétrer jusqu’à la moelle des os de ces flammes sacrées, laissez-vous y réduire tout en cendres ; puis, si le souffle très doux du Saint-Esprit élève cette cendre à la contemplation des divins mystères, laissez à votre âme la liberté de s’engouffrer dans cette sainte contemplation. Oh ! combien cette pratique plaît à Dieu ! » ……
Il n’est pas rare que des âmes rencontrent des obstacles dans les voies spirituelles de la part de ceux-là mêmes qui devraient les guider et les faire avancer. Saint Jean de la Croix le déplorait avec beaucoup de zèle. Le père Paul a laissé pour ce cas des avis excellents dans une lettre qu’il adresse à une personne qui était peu comprise et peu aidée de son confesseur. « Quand le confesseur vous aura congédiée, retirez-vous en paix, et aussitôt gémissez amoureusement comme une enfant, selon la parabole que je vous fis précédemment. Ah ! Mon Père ! Ah ! Mon bon Père ! Témoignez ainsi à Dieu la peine, l’angoisse et les craintes que vous donne la parole du confesseur, et soudain, vous éprouverez un attrait fort suave qui transportera votre esprit dans les profondeurs de cette divine solitude, où l’âme est tout absorbée en Dieu. Vos angoisses, vos craintes et vos scrupules seront consumés dans le feu du saint amour. Tenez-vous là en repos, et si votre divin Époux vous invite au sommeil, dormez en paix et ne vous éveillez pas sans sa permission. Ce sommeil divin est un héritage que le Père céleste donne à ses enfants bien-aimés. C’est un sommeil de foi et d’amour où l’on apprend la science des Saints et pendant lequel on digère tout d’un coup les amertumes des adversités… O silence ! ô sommeil sacré ! ô solitude précieuse ! Soyez toujours de plus en plus humble, tenez-vous toujours dans une vraie pauvreté d’esprit, dépouillez-vous, comme je vous l’ai dit, de tous les dons, car nous les souillons par nos imperfections ; faites-en un sacrifice de louange, d’honneur, et de bénédiction au très Haut, en demeurant dans votre nudité. Ce sacrifice doit se faire dans le feu de l’amour, sans jamais sortir du désert sacré. »
……« Ne manquez pas, disait-il dans une autre lettre, de pratiquer la véritable pauvreté d’esprit, en vivant dans un détachement parfait de toute consolation sensible tant intérieure qu’extérieure, pour ne pas tomber dans le vice de la gourmandise spirituelle. Il faut nous détacher de la satisfaction propre, du jugement propre et du propre sentiment, pour ne pas tomber dans la curiosité spirituelle, et pour pratiquer la véritable pauvreté d’esprit. » Afin de donner plus d’autorité à cet enseignement, il propose l’exemple de notre divin Maître : « Jésus, dit-il, a prié pendant trois heures sur la croix : ce fut une oraison vraiment crucifiée, sans consolation ni intérieure in extérieure. O Dieu, quel grand enseignement ! Priez Jésus qu’il l’imprime dans votre cœur. Oh ! Combien il y a à méditer là-dessus ! …..
Comme le recueillement est un excellent moyen pour bien faire l’oraison et qu’il est aussi la marque d’une oraison bien faite, le père Paul recommandait avec instance de se tenir recueilli pendant le jour et d’éviter la dissipation. Il écrivait à une personne pieuse : « Conservez votre esprit libre et pur de tout fantôme, dépouillé de toutes les créatures, afin qu’il soit plus en état de s’unir au souverain Bien par une volonté fervente….. » ……– Votre oraison doit être continuelle ; vous me comprenez. Le lieu où on doit faire oraison, c’est l’esprit de Dieu ; il faut psalmodier en Dieu, il faut faire toutes choses en Dieu. – Oraison, vingt-quatre heures par jour, écrivait-il dans un règlement de vie pour une religieuse, c’est-à-dire, faire toutes ses actions de cœur, et l’esprit élevé en Dieu, en se tenant dans la solitude intérieure et se reposant saintement en Dieu dans la foi pure. »….
Le monde a toujours été l’ennemi de Dieu et de ceux qui ont des rapports intimes avec lui et conversent familièrement, amicalement, avec lui. C’est pourquoi le père Paul voulait qu’on évitât le plus possible les rapports avec les gens du monde et qu’on ne se familiarisât point avec eux. Il disait à une de ses pénitentes : « Commencez par mettre généreusement le respect humain sous vos pieds ; ne rougissez pas d’être servante de Jésus-Christ. Regardez ce monde avec l’horreur que vous inspirerait la vue d’un criminel pendu à une potence. Sachez qu’on y respire un air empesté des mille péchés qui s’y commettent et qu’il faudrait pleurer avec des larmes de sang. » Pour éloigner de plus en plus les âmes de la contagion presque universelle qui règne dans le monde, il conseillait à celles qui étaient sous sa conduite, et surtout aux religieuses, un grand amour de la solitude ; c’est le moyen en effet d’avoir des rapports continuels avec Dieu.
……
Le père Paul avait le plus vif désir que ses pénitents fussent tout à Dieu ; mais comme il avait l’esprit de Dieu qui est un esprit de sagesse et de discrétion, il exigeait avant tout qu’on remplît les devoirs de son état et qu’on fût aussi accommodant que possible pour tout le monde, prenant bien garde de rendre la dévotion pénible et fâcheuse pour les autres. Il écrivait à un de ses pénitents qui était marié : « Chacun doit vivre saintement dans son état, et celui qui est marié ne doit pas vivre en capucin. – Vous êtes le maître, disait-il au même, de faire le voyage de Lorette, quand il vous plaît ; je dis pourtant que ceux qui font beaucoup de voyages, se sanctifient rarement. J’estime que vous rendriez un plus grand service à Dieu, de veiller sur votre famille et sur les intérêts de votre maison. » …..Il écrivait à une autre qui était dans la même position : « J’ajoute que vous ne devez pas rester si longtemps le matin à l’église ; faites l’action de grâces convenable et retournez aussitôt à la maison pour ne donner à personne sujet de se plaindre. » Il voulait qu’on prît tout le temps nécessaire pour remplir exactement ses devoirs d’état ; en conséquence il engageait à mesurer le temps à consacrer à l’oraison sur la position et les obligations de chacun. Il écrivait à un homme marié : « Si vous ne pouvez donner beaucoup de temps à l’oraison, il n’importe : c’est toujours prier que de bien faire. Soyez attentif à vos devoirs domestiques et tenez-vous en même temps attentif à Dieu, en élançant souvent votre cœur dans l’océan immense du divin amour. »
Dans la règle de 1775
CHAPITRE IV
De la conduite à suivre dans l'admission d'un postulant
4 Celui qui désire entrer dans la Congrégation doit d'abord examiner si Dieu l'appelle à ce genre de vie. Il mûrira son projet par la prière, le jeûne et la fréquentation des sacrements. (….).
CHAPITRE XIX
Des autres exercices de piété dans la Congrégation
21 Durant le cours de l'année, après cinq heures de sommeil, on se lèvera la nuit pour chanter les louanges de Dieu. Au chœur, I’ Office divin se récitera d'un ton grave et pieux, en faisant au milieu de chaque verset une pause convenable permettant de méditer, dans des intervalles opportuns, les paroles qu'on prononce, et de recueillir les fruits abondants et suaves offerts par les divines Ecritures, comme une nourriture vivifiante, à ceux qui psalmodient non seulement de bouche, mais d'esprit et de cœur. A moins que l'Office ne soit chanté solennellement, on le dira tout entier debout, en signe de révérence et d'humilité devant la Majesté divine; on s'assoira cependant durent la lecture des leçons de Matines. (….) Du premier octobre au premier avril pendant une heure, le reste de l'année pendant une demi-heure, ils s'appliqueront à l'oraison, étant tous rassemblés dans un même lieu; et personne, même durant l'Office divin, ne pourra s'absenter sans la permission du Supérieur. Ensuite, durant l'hiver, on ira se chauffer en récitant le cantique «Benedicite omnia opera Domini Domino» et l'on retournera dans sa cellule jusqu'à l'heure de Prime. Si quelqu'un, mû par la ferveur, désire continuer l'oraison, il en demandera la permission au Supérieur, qui l'accordera selon la condition et la vertu de celui qui la sollicite. Après l'Office de nuit, on se reposera trois heures du premier octobre au premier avril; dans le reste de l'année, pendant deux heures et demie. Après quoi, on se lèvera de nouveau. Ensuite, on se rend au chœur pour réciter Prime et Tierce; puis on fera une heure de méditation, pendant laquelle il est permis de célébrer et d'entendre les messes. Les prêtres chargés de fonctions dans la Congrégation ont la faculté, aussitôt après une demi-heure d'oraison, de célébrer la sainte Messe. A l'heure indiquée sur le tableau qui donne l'ordre de tous les exercices, on célébrera la dernière Messe, à laquelle assisteront ceux qui n'en ont pas un véritable empêchement. Avant Sexte et None, ainsi que avant Complies, il y aura pour le soulagement de l'esprit et du corps une demi-heure de promenade silencieuse et solitaire. Après la psalmodie, au chœur, de Sexte et None, on se rendra au réfectoire. A l'heure marquée, on ira dire les Vêpres au chœur et faire en commun, après quelques instants de recueillement, une lecture spirituelle d'un quart d'heure environ; puis chacun se rendra à ses occupations: étude ou travail. Après la psalmodie des Complies, on consacrera une heure entière à l'oraison mentale. En voyage et lorsqu'on est retenu hors de la Retraite par d'autres occupations, comme il est difficile de s'adonner aussi longuement à la méditation, on ne laissera pas cependant passer la journée sans en faire au moins une heure, choisissant pour cela le temps le moins occupé, et surtout la pointe du jour, afin de poursuivre ensuite plus librement son voyage ou ses travaux. Que les religieux prennent garde de délaisser jamais la méditation, parce qu'autrement, privés par leur faute des fruits abondants qu'elle apporte, ils tomberaient dans de grands maux auxquels d'ordinaire on ne remédie qu'avec beaucoup de temps. Tous les prêtres sont instamment priés de bien s'établir, avant le divin sacrifice de la Messe, dans une grande pureté d'âme et le recueillement. Qu'ils observent avec soin et révérence tous les rites prescrits par l'Église, accomplissant avec exactitude et dignité les cérémonies, respirant dans leurs paroles et leurs gestes, la beauté de la religion et sa sainteté. La Messe terminée, qu'ils rendent à Dieu un juste tribut de louanges et d'actions de grâces et ne passent pas de suite à d'autres occupations. Ils retireront ainsi de l'oblation du saint Sacrifice des fruits plus abondants, s'embraseront de jour en jour de l'amour de Dieu et seront mieux préparés et plus dignes pour traiter les divins Mystères.
CHAPITRE XX
De ce que doivent faire les frères convers
22 Pendant que se psalmodie au chœur l'office de Matines, les frères convers récitent la couronne de Notre Seigneur Jésus-Christ, c'est-à-dire trente-trois Pater en mémoire de sa très sainte vie, de sa Passion et de sa mort; à l'heure de Prime, ils disent sept Pater et Ave en mémoire de ses labeurs apostoliques; à Tierce, cinq Pater et Ave en se remémorant sa flagellation; à Sexte, trois Pater et Ave en pensant au couronnement d'épines et aux railleries de ses ennemis; à None, trois Pater et Ave en méditant sur le crucifiement, I'agonie et la mort qu'il a daigné subir pour nous. A Vêpres, ils récitent en mémoire des douleurs de la bienheureuse Vierge Marie sept Pater et Ave; et cinq à Complies en l'honneur des cinq plaies du Sauveur et de sa sépulture. Ils donnent à l'oraison le même temps que les autres; et après celle du matin et l'assistance au divin Sacrifice, chacun se rend à son travail. A toutes les fêtes qui ne se suivent pas immédiatement, après avoir purifié leur conscience par le sacrement de pénitence, ils feront la sainte communion. Ils feront de même le vendredi. Pendant le Carême et l'Avent, ils communient trois fois par semaine à moins que le Supérieur n'en décide autrement ou le directeur spirituel ne conseille diversement. Que les frères convers s'acquittent avec exactitude et diligence des emplois dont ils ont la charge, et acceptent de bon gré les travaux manuels qui leur reviennent. Qu'ils vénèrent les prêtres comme les ministres de Dieu; qu'ils soient humbles, obéissants, amis fervents de la pauvreté religieuse. Qu'ils aient grand soin de tout ce qui appartient à la Congrégation et le considèrent comme des biens appartenant à Dieu, n'oubliant pas que la garde leur en est confiée et que, si par leur faute ils venaient à se perdre ou se détériorer, le Seigneur leur en demanderait compte. Ils réfléchiront souvent sur la fin de la Congrégation qu'ils ont embrassée, et y conformeront leurs intentions et leurs actions.
CHAPITRE XXI: De l'oraison
23 On prendra d'ordinaire pour sujet de la méditation les perfections et les attributs divins, comme aussi les mystères de la vie, de la Passion et de la mort de Notre Seigneur Jésus-Christ, source principale d'enseignements et de progrès pour toute perfection religieuse et pour la sainteté. Que chacun s'efforce de s'embraser d'amour divin et d'entretenir une foi vive, agissante, constante. Qu'on garde en toute circonstance la pensée de la présence de Dieu. C'est ainsi que l'on prie sans cesse, qu'on évite facilement le mal, qu'on pratique la vertu. (…)
CHAPITRE XXXVIII
De ce qu'on doit faire à la mort des religieux et des sacrifices et prières pour eux et pour les bienfaiteurs
47 Dès qu'un de nos prêtres, clercs ou frères convers sera décédé, le Supérieur de la maison l'annoncera à chaque Recteur de la province, afin qu'on s'acquitte, en faveur de son âme, des prières et des sacrifices prescrits. A la nouvelle du décès, dans chaque maison on récitera au chœur les Matines et les Laudes des morts et on célébrera une messe. De plus, chaque prêtre dira trois messes; les clercs et les frères convers appliqueront cinq communions et le rosaire entier; tous les religieux se donneront une fois la discipline pour la délivrance de l'âme du décédé. Nous exhortons tous les membres de la Congrégation à appliquer volontiers pour les défunts, conformément à la tradition de l'Eglise catholique, autant d'œuvres de piété et d'indulgences qu'ils le pourront. (….). En plus des prières et des autres œuvres de piété qui se font continuellement dans la Congrégation pour nos religieux défunts et pour nos bienfaiteurs tant vivants que décédés, une fois par mois, on récitera l'Office des morts et on célébrera le saint Sacrifice pour nos bienfaiteurs décédés. On fera de même pour nos religieux. (….).
Dans constitutions
38 37. Saint Paul de la Croix, homme de grande oraison, insistait fortement, par la parole et l'exemple, sur l'importance de la prière.
Il désirait que ses disciples prient sans interruption, et que nos communautés soient des lieux capables de favoriser une forte expérience de Dieu et deviennent d'authentiques écoles de prière (RetC pp. 2-3; 8-9).
Il nous apprit à vivre le silence intérieur et extérieur, qui apporte le calme et la paix profonde nécessaires à l'esprit de prière, qui libère des préoccupations et fait taire les voix discordantes de nos obligations quotidiennes (RetC pp 101-102).
39 38. Vivant en prière devant Dieu et au milieu des hommes, notre communauté participe à l'attitude priante de l'Église. Poussés par l'Esprit de Dieu, en fils adoptifs, nous crions: «Abba, Père» (Rm 8,15).
En union avec le Christ, nous louons l'œuvre merveilleuse de Dieu, contemplons le mystère du salut révélé en Jésus-Christ (Ep 1,9-12) et collaborons à son expansion dans l'attente de sa manifestation finale (Col 3,4).
Ainsi notre prière, par sa fécondité apostolique cachée, fait grandir le peuple de Dieu (PC 7), et elle se fait l'écho d'une vie de solidarité avec nos frères, spécialement les pauvres et les délaissés (SCRIS, Dimensione Contemplative della vita religiosa, Roma, 12.08.08, A:5).
40 39. La vie de prière communautaire et individuelle nous porte à vivre en communion avec la Sainte Trinité (Rm 8,26-27). En priant, nous répondons à l'invitation amoureuse du Père. Poussés par l'Esprit, nous nous unissons à la personne du Christ, spécialement dans le mystère pascal, que nous contemplons dans la méditation personnelle qui nous conduit à un amour toujours plus grand.
Nous participons à ce mystère à travers les événements du monde, dans lesquels nous sommes impliqués par notre vie et notre travail, et nous le revivons dans la célébration liturgique.
Ainsi, par la prière, notre vie s'unit à celle du Christ dans son chemin vers le Père.
41 40. La vie de prière exige que nous nous examinions sur notre manière de vivre à la lumière de l'Évangile.
Nous devons constamment nous demander si la prière exerce une influence efficace sur notre vie personnelle, sur celle de la Communauté et dans notre travail apostolique.
42 41. Notre vie de prière trouve son expression première et fondamentale dans la liturgie, prière de l'Eglise (SC 5-11).
Par la célébration de l'année liturgique, nous sommes introduits dans la plénitude du mystère chrétien, et nourris du pain de vie à la table de la Parole de Dieu, comme à celle du Corps du Christ (DV 21). (Const. n. 37)
Date de dernière mise à jour : 2015-11-24
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