Passioniste de Polynésie

Sainte Julienne du Mont-CORNILLON

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Henri et de Frescinde, habitants du village de Rétine, près de Liège, moururent en 1197, laissant deux orphelines : Agnès (née en 1191) et Julienne (née en 1192). Les deux fillettes furent placées au couvent des augustines hospitalières du Mont-Cornillon, nouvelle fondation où les religieuses, très fidèles à leur vœu de pauvreté, soignaient des lépreux et des malades. Situé aux portes de Liège, le monastère du Mont-Cornillon comprenait une communauté masculine et une communauté féminine ; la communauté féminine avait une prieure mais le prieur de la communauté masculine lui était supérieur. Sous l'autorité de la sœur Sapience qui les instruisit de la doctrine chrétienne et leur raconta la vie des saints, Agnès et Julienne demeuraient dans une métairie qui dépendait du couvent. Julienne, enthousiasmée par la vie religieuse, encore qu'elle eut un grand attrait pour la solitude, apprit par cœur le psautier et se livra à de si grandes austérités que la sœur Sapience dut la ramener à la modération, lui apprenant, qu'aux yeux du Seigneur, la pratique de l'obéissance vaut mieux que le sacrifice.

Julienne, ayant reçu, à quatorze ans, l'habit des religieuses du Mont-Cornillon (1207), apprit le latin pour mieux s'instruire des vérités de la religion et devint familière des écrits des Pères, singulièrement de saint Augustin et de saint Bernard. Intelligente et instruite, discrète et obéissante, la sœur Julienne, deux ans après sa prise d'habit, reçut, une nuit, la vision du globe de la lune rayonnant de lumière mais traversé en son diamètre par une ligne obscure ; ne comprenant pas cette vision, elle en demanda l'explication à quelques religieuses vertueuses qui lui déconseillèrent d'approfondir ce mystère mais qui ne purent s'empêcher de bavarder, au point que des visiteurs vinrent l'importuner. Sœur Sapience qui était devenue prieure du couvent, sachant la dévotion de Julienne pour l'Eucharistie et son goût pour la solitude, lui fit construire un oratoire où elle put se retirer pour prier. Personne ne lui ayant expliqué sa vision, elle se résolut à prier le Seigneur de lui révéler ce mystère et, pendant son sommeil, en 1210, une voix lui dit : L'Eglise militante est figurée par le globe de la lune ; la tache qui en voile une partie signifie qu'il manque une fête dont Dieu veut l'institution ; c'est la fête du très auguste et très saint sacrement de l'autel. Le Jeudi saint, à la vérité, est désigné cet effet, mais les diverses autres cérémonies de ce jour en empêchent la solennité ; il faut en établir une autre qui sera honorée et observée dans toute la chrétienté. Et cela pour trois raisons : 1. pour que la foi aux mystères de la religion qui diminue et diminuera encore si I'on n'y porte remède soit affermie et confirmée en son entier ; 2. pour que les hommes qui aiment et cherchent la vérité en soient pleinement instruits, et puisent dans cette source de vie des forces pour avancer dans le chemin de la vertu ; 3. pour que les irrévérences et impiétés journalières qui se commettent contre la majesté de ce sacrement soient réparées et expiées par une adoralion profonde et sincère. Désormais, Julienne ne s'occupa plus que de la pensée de Dieu seul qui la favorisa d'une vie mystique extraordinaire, du don de prophétie et de la connaissance des cœurs.

En 1222, lorsque mourut la sœur Sapience, Julienne fut élue prieure du Mont-Cornillon. Elle n'avait pas encore divulgué la révélation qu'elle avait eue et, comme elle demandait au Seigneur de la délivrer de cette mission, elle reçut, au contraire, l'ordre d'agir sans tarder. Ne sachant guère comment s'y prendre, elle décida de révéler sa mission à Eve, une recluse qu'elle avait naguère encouragée et qu'elle voyait une fois par ans, et à Isabelle, une religieuse de Huy. Elles s'adressèrent à Jean de Lausanne, pieux et savant chanoine de l'Eglise Saint-Martin, près de laquelle résidait Eve la recluse ; le chanoine saisit Jacques Pantaléon, archidiacre de Liège, Hugues de Saint-Cher, provincial des Dominicains, Guy de Laon (futur évêque de Cambrai), le chancelier de l'université de Paris et deux dominicains, les pères Jean et Gérard, tous docteurs de l'Université, qui autorisèrent Julienne à faire composer l'office de la Fête-Dieu par Jean, religieux du Mont-Cornillon. Comme le clergé liégeois était divisé sur l'utilité de cette fête, Julienne qui ne voulait rien précipiter, s'en alla en pèlerinage à Cologne, à Tongres et à Maestricht. Un mouvement favorable se produisit à Liège mais le nouveau supérieur du Mont-Cornillon, Roger, souleva les religieuses contre leur prieure qui, avec quatre de ses sœurs et grâce à l'appui de Jean de Lausanne, put se réfugier près de l'église Saint-Martin. Trois mois plus tard, l'évêque de Liège déposait Roger, donnait la charge à Jean (l'auteur de l'office) et Julienne reprenait sa place de prieure.

L'évêque de Liège, Robert de Thourotte, hésitait encore à établir la fête lorsque, sur la route du concile de Lyon, Dieu lui intima sa volonté ; de retour à Liège, il établit la Fête-Dieu dans son diocèse (1246). Après la mort de Robert de Thourotte (16 novembre 1246), sous son successeur, Henri de Gueldre qui rétablit Roger, les persécussions reprirent contre Julienne ; accompagnée de trois fidèles (Agnès, Ozilie et Isabelle de Huy) elle, dut se retirer d'abord à Robermont, au Val-Notre-Dame, puis à Namur, près de l'église Saint-Aubin. Ses compagnes cependant craignaient pour sa santé qui allait en s'affaiblissant. Ne craignez rien, leur disait-elle, je vous tiendrai fidèle compagnie jusqu'à la mort, et même je vous survivrai. En effet, deux d'entre elles (Agnès et Ozilie) moururent peu après, à Namur. Puis Julienne se retira à l'abbaye cistercienne de Salsines.

Cependant, Hugues de Saint-Cher, devenu cardinal de Sainte-Sabine et légat du pape dans le Saint-Empire, approuvait l'établissement de la fête qu'il voulait imposer à tous les diocèses de sa légation. Bientôt Julienne perdit à Salsines la fidèle compagne qui lui restait ; une autre religieuse du Mont-Cornillon, Ermentrude, lui fut envoyée pour l'assister jusqu'à sa mort. La persécution frappa les religieuses de Salsines, JuIienne dut se retirer à Fosses entre Sambre et Meuse, elle y fut attaquée d'une maladie grave, fit mander le chanoine Jean de Lausanne qui ne crut pas devoir venir, et se trouva dans un suprême délaissement qu'elle avait d'ailleurs prédit.

La maladie empira durant le carême. Le jour de Pâques, malgré. son épuisement, elle voulut se rendre à l'église, assista à matines et à laudes, reçut la communion et resta à l'église jusqu'à la fin du jour. Le soir, elle retourna dans sa cellule, demanda l'extrême-onction qu'elle reçut avec des larmes de joie et une présence d'esprit admirable. Le mercredi après l'octave de Pâques elle se trouva plus mal : Himana, l'abbesse de Salsines, accourue à l'annonce du danger, voulut passer la nuit auprès d'elle mais Julienne l'invita à se reposer en l'assurant qu'elle ne mourrait pas ce jour-là. Le jeudi, elle pria Ermentrude de lui réciter son office pour qu'elle pût au moins la suivre d'esprit et de cœur. Le vendredi, Himana vint encore la visiter avec quelques religieuses et toutes jugèrent que c'était la fin. Julienne reçut une dernière fois la sainte communion et s'endormit dans le Seigneur (5 avril 1258).

Trois ans plus tard (29 août 1261), l'ancien archidiacre de Liège, Jacques Pantaléon, depuis évêque de Verdun (1253) puis patriarche de Jérusalem (1255), bien qu'il ne fût pas cardinal, était élu pape ; il publia la bulle Transiturus, le 11 août 1264, à Orvieto : Nous avons jugé à propos de statuer que, outre la mémoire qui se fait tous les jours dans l'Eglise d'un si grand sacrement, l'on en fit encore une annuellement qui fût plus particulière et plus solennelle, assignant pour cela un jour déterminé que nous voulons être le jeudi après l'octave de la Pentecôte.

 

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Date de dernière mise à jour : 2021-07-04