Passioniste de Polynésie

Pierre Damien quelques écrits

Pierredamien 1Saint Pierre Damien (1007-1072), ermite puis évêque, docteur de l'Église

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« Vous verrez les cieux ouverts, avec les anges de Dieu qui montent et descendent au-dessus du Fils de l'homme » 

      La gloire de tous les apôtres est tellement indissociable, elle est unie par le ciment de tant de grâces, que lorsqu'on célèbre la fête de l'un d'eux c'est la grandeur commune de tous les apôtres qui est rappelée à l'attention de notre regard intérieur. Ils se partagent en effet la même autorité de juges suprêmes, le même rang de dignité et ils possèdent le même pouvoir de lier et d'absoudre (Mt 19,28; 18,18). Ils sont ces perles précieuses que saint Jean nous dit avoir contemplées dans l'Apocalypse et dont les portes de la Jérusalem céleste sont construites (Ap 21,21.14)... En effet, lorsque par des signes ou des miracles les apôtres rayonnent la lumière divine, ils ouvrent l'accès de la gloire céleste de Jérusalem aux peuples convertis à la foi chrétienne...

      C'est d'eux encore que le prophète dit : « Qui sont ceux-là, qui volent ainsi que des nuages ? » (Is 60,8)... Dieu élève l'esprit de ses prédicateurs à la contemplation des vérités d'en haut... de sorte qu'ils puissent répandre en abondance la pluie de la parole de Dieu dans nos cœurs. C'est ainsi qu'ils boivent l'eau à la source pour nous la donner à boire à notre tour. Saint Barthélémy a puisé à la plénitude de cette source, lorsque l'Esprit Saint est descendu sur lui comme sur les autres apôtres sous la forme de langues de feu (Ac 2,3).

      Mais tu entends parler de feu et peut-être que tu ne vois pas le rapport avec l'eau. Écoute comment le Seigneur appelle eau cet Esprit Saint qui est descendu comme un feu sur les apôtres. « Si quelqu'un a soif, dit-il, qu'il vienne à moi et qu'il boive », et il ajoute : « Celui qui croit en moi — l'Écriture le dit — des fleuves d'eau vive jailliront de son cœur », et l'évangéliste explique : « Il disait cela de l'Esprit que devaient recevoir ceux qui croiraient en lui » (Jn 7,37-39). Le psalmiste dit aussi des croyants : « Ils se rassasient de l'abondance de ta maison et tu les abreuves au torrent de tes délices, car en toi se trouve la source de la vie » (35,10). 

Sermon 42, 2ème pour la saint Barthélémy ; PL 144, 726 (trad. Orval)

separ ecrit biblio« Comme la pluie et la neige descendent des cieux... ainsi ma parole qui sort de ma bouche » (Is 55,10)

           Les apôtres sont ces perles précieuses que saint Jean nous dit avoir contemplées dans l'Apocalypse et dont les portes de la Jérusalem céleste sont construites (Ap 21,21)... En effet, lorsque par des signes ou des miracles les apôtres rayonnent la lumière divine, ils ouvrent l'accès de la gloire céleste de Jérusalem aux peuples convertis à la foi chrétienne. Et quiconque est sauvé grâce à eux entre dans la vie, tel un voyageur franchissant une porte... C'est d'eux encore que le prophète dit : « Qui sont ceux-là, qui volent ainsi que des nuages ? » (Is 60,8) Ces nuages se condensent en eau lorsqu'ils arrosent la terre de notre cœur avec la pluie de leur enseignement pour la rendre fertile et porteuse des germes de bonnes œuvres.

           Barthélemy, dont c'est la fête aujourd'hui, veut précisément dire en araméen : fils de celui qui porte l'eau. Il est le fils de ce Dieu qui élève l'esprit de ses prédicateurs à la contemplation des vérités d'en-haut de sorte qu'ils puissent répandre avec efficacité et en abondance la pluie de la parole de Dieu dans nos cœurs. C'est ainsi qu'ils boivent l'eau à la source pour nous la donner à boire à notre tour.

Sermon 42, deuxième pour S. Barthélemy : PL 144, 726, 728 C-D (trad. Orval)

separ ecrit biblioPrécurseur par sa vie et par sa mort

            Précurseur du Christ, Jean l'a été par sa naissance, par sa prédication, par son baptême et par sa mort... Peut-on trouver une seule vertu, un seul genre de sainteté, que le Précurseur n'ait possédé au plus haut degré ? Parmi les saints ermites, lequel s'est jamais imposé cette règle de n'avoir pour nourriture que du miel sauvage ou ce mets immangeable : des sauterelles ! Certains renoncent au monde et fuient les hommes pour vivre saintement, mais Jean n'est encore qu'un enfant...quand il s'enfonce dans le désert et choisit résolument d'habiter dans la solitude. Il a renoncé à succéder à son père dans la charge de prêtre, afin de pouvoir annoncer en toute liberté le Prêtre véritable et souverain. Les prophètes ont prédit à l'avance la venue du Sauveur, les apôtres et les autres enseignants de l'Eglise attestent que cette venue a réellement eu lieu, mais Jean le montre présent parmi les hommes. Beaucoup ont gardé la virginité et n'ont pas souillé la blancheur de leur vêtement (cf Ap 14,4), mais Jean renonce à toute compagnie humaine afin d'arracher les convoitises de la chair jusqu'à leurs racines, et, plein de ferveur spirituelle, il habite parmi les bêtes sauvages.

            Jean préside même au sein du chœur écarlate des martyrs, comme leur maître à tous : il a combattu vaillamment pour la vérité, et il est mort pour elle. Il est devenu le chef de tous ceux qui combattent pour le Christ, et, le premier de tous, il est allé planter au ciel l'étendard triomphal du martyre.

Sermons 24-25

separ ecrit biblio« Ce pain-là, qui descend du ciel, celui qui en mange ne mourra pas »

      La Vierge Marie a enfanté Jésus Christ, elle l'a réchauffé dans ses bras, elle l'a enveloppé de langes et l'a entouré de soins maternels. C'est bien ce même Jésus dont nous recevons maintenant le corps et dont nous buvons le sang rédempteur au sacrement de l'autel. Voilà ce que la foi catholique tient pour vrai, voilà ce qu'enseigne fidèlement l'Église.

      Aucune langue humaine ne pourra assez glorifier celle de qui a pris chair, nous le savons, « le médiateur entre Dieu et les hommes » (1 Tm 2,5). Aucun éloge humain n'est à la mesure de celle dont les entrailles très pures ont donné le fruit qui est l'aliment de nos âmes ; celui, autrement dit, qui témoigne de lui-même par ces paroles : « Je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel ; si quelqu'un mange de ce pain, il vivra éternellement ». Et en effet, nous qui avons été chassés du paradis de délices à cause d'une nourriture, c'est aussi par une nourriture que nous retrouvons les joies du paradis. Ève a pris une nourriture, et nous avons été condamnés à un jeûne éternel ; Marie a donné une nourriture, et l'entrée du festin du ciel nous a été ouverte

Sermon 45 ; PL 144,743 et 747 (trad. Orval)

separ ecrit biblioHeureux ceux qui accueillent la Parole de Dieu, son Verbe

      Il appartient à la Vierge Marie d'avoir conçu le Christ en son sein, mais c'est le partage de tous les élus de le porter avec amour dans leur coeur. Heureuse, oui, très heureuse la femme qui a porté Jésus en elle durant neuf mois (Lc 11,27). Heureux, nous aussi, lorsque nous veillons à le porter sans cesse en notre coeur. Certes, la conception du Christ dans le sein de Marie a été une grande merveille, mais ce n'est pas une moindre merveille que de le voir devenir l'hôte de notre poitrine. C'est le sens de ce témoignage de Jean : « Me voici à la porte et je frappe ; si quelqu'un entend ma voix et m'ouvre la porte, j'entrerai chez lui, et je souperai avec lui et lui avec moi » (Ap 3,20)... Ici encore, mes frères, considérons quelle est notre dignité et notre ressemblance avec Marie. La Vierge a conçu le Christ dans ses entrailles de chair, et nous le portons dans celles de notre coeur. Marie a nourri le Christ en donnant à ses lèvres le lait de son sein, et nous pouvons lui offrir le repas varié des bonnes actions qui font ses délices. 

Sermon 45, PL 144, 747 (trad. Orval)

separ ecrit biblio« Recevoir le centuple dès maintenant, au temps présent » (Mc 10,30)

      Il faut que nous vivions détachés de nos possessions et de notre volonté propre, si nous voulons suivre celui qui n'avait « pas d'endroit où reposer la tête » (Lc 9,58) et qui est venu « non pour faire sa volonté, mais pour faire la volonté de celui qui l'a envoyé » (Jn 6,38)... Aussitôt nous connaîtrons par expérience ce que la Vérité promet à quiconque abandonne tout et marche à sa suite : « Il recevra le centuple..., et il aura en héritage la vie éternelle » (Mc 10,30). En effet, le don du centuple nous est un réconfort pour la marche, et la possession de la vie éternelle fera notre bonheur pour toujours dans la patrie céleste.

      Mais quel est ce centuple ? Simplement, les consolations de l'Esprit doux comme le miel, ses visites et ses premiers fruits. C'est le témoignage de notre conscience, c'est l'heureuse et très joyeuse attente des justes, c'est la mémoire de la bonté surabondante de Dieu, c'est aussi, en vérité, l'immensité de sa douceur. Ceux qui ont fait l'expérience de ces dons n'ont pas besoin qu'on leur en parle, et qui pourrait les décrire avec de simples mots à ceux qui ne l'ont pas faite ? 

Sermon 9 ; PL 144, 549-553 (trad. Delhougne, Les Pères commentent, p.499)

separ ecrit biblio« La Vierge Marie qui a fait lever sur le monde l'espérance et l'aurore du salut » 

      « Qui est celle-ci ? » demande l'Esprit Saint lorsque Marie vient au monde. « Qui est celle qui s'avance ? Elle surgit comme l'aurore, elle est belle comme la lune, resplendissante comme le soleil » (Ct 6,10)...

      « Elle surgit comme l'aurore. » Dans l'éclat de midi, notre premier père a été fait à l'image et à la ressemblance de son Créateur (Gn 1,26). Quoi de plus glorieux pour le créé que de ressembler au Créateur ?... Il lui a donné l'image éternelle ; la ressemblance était à faire : il fallait que l'homme devienne semblable à son Créateur. Lui pourtant a rejeté l'honneur d'un tel privilège..., se vouant à la mort, avec toute sa descendance, dans les ténèbres. Les ténèbres recouvraient toute la terre (cf Gn 1,2), jusqu'à ce que vienne la Vierge. Il n'y avait personne pour sortir de ces ténèbres, personne pour les dissiper... Mais avec la Vierge surgit l'aurore : Marie annonce la vraie lumière ; par sa nativité elle fait luire le plus resplendissant des matins. Elle est l'étoile du matin... Elle est cette aurore que suit –- ou plutôt de laquelle naît –- le Soleil de justice (Ml 3,20), qui seul la surpasse de splendeur...

      « A toi, Seigneur, le jour » où Adam a été créé ; « à toi la nuit » (Ps 73,16) où il a été chassé de ta lumière. C'est toi qui a créé l'aurore, c'est-à-dire la Vierge Marie, et le Soleil, ce Soleil de justice qui s'est levé de son sein virginal. Comme l'aurore annonce la fin de la nuit et marque le commencement du jour, ainsi la Vierge a mis en fuite la nuit sans fin. Et jour après jour, elle donne à la terre celui qui a germé de sa virginité. 

(Prière après la communion)

separ ecrit biblio Tout quitter pour suivre le Christ

      C'est une grande chose, en vérité, de « tout quitter », mais une plus grande de « suivre le Christ » car, comme nous l'apprenons dans les livres, beaucoup ont tout quitté mais n'ont pas suivi le Christ. Suivre le Christ est notre tâche, c'est notre travail, en cela consiste l'essentiel du salut de l'homme, mais nous ne pouvons pas suivre le Christ si nous n'abandonnons pas tout ce qui nous entrave. Car « il s'élance en conquérant joyeux » (Ps 18,6), et personne ne peut le suivre s'il est chargé d'un fardeau.

      « Voilà, dit Pierre, que nous avons tout quitté », non seulement les biens de ce monde, mais aussi les désirs de notre âme. Car il n'a pas tout abandonné, celui qui reste attaché ne serait-ce qu'à lui-même. Bien plus, cela ne sert à rien d'avoir abandonné tout le reste à l'exception de soi-même, car il n'y a pas pour l'homme de fardeau plus lourd que son moi. Quel tyran est plus cruel, quel maître plus impitoyable pour l'homme que sa volonté propre ?… Par conséquent, il faut que nous abandonnions nos possessions et notre volonté propre si nous voulons suivre celui qui n'avait « pas d'endroit où reposer la tête » (Lc 9,58) et qui est venu « non pour faire sa volonté, mais pour faire la volonté de celui qui l'a envoyé » (Jn 6,38).

Sermon 9 ; PL 144, 549-553 (trad. Delhougne, Les Pères commentent, p. 499)

separ ecrit biblio« Que tous, ils soient un, comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi »

      La sainte Eglise, bien que diverse dans la multiplicité des personnes, est unifiée par le feu de l'Esprit Saint. Si, matériellement, elle semble répartie en plusieurs familles, le mystère de son unité profonde ne peut rien perdre de son intégrité : « Car l'amour de Dieu a été répandu dans nos coeurs par le Saint Esprit qui nous a été donné », dit saint Paul (Rm 5,5). Cet Esprit, sans nul doute, est un et multiple à la fois, un dans l'essence de sa majesté, multiple dans les dons et charismes accordés à la sainte Eglise qu'il remplit de sa présence. Et cet Esprit donne à l’Eglise d'être à la fois une dans son extension universelle et tout entière en chacun de ses membres…

      Si donc ceux qui croient dans le Christ sont un, partout où l'un d'entre eux se trouve physiquement, le corps de l'Eglise tout entier est là par le mystère sacramentel. Et tout ce qui convient au corps entier semble convenir à chacun des membres… Voilà pourquoi, quand plusieurs fidèles se trouvent ensemble, ils peuvent dire : « Incline, Seigneur, ton oreille et exauce-moi car je suis pauvre et malheureux ; garde mon âme puisque je suis fidèle » (Ps 85,1). Et lorsque nous sommes seuls, nous pouvons bien chanter : « Chantez tous pour Dieu, notre salut, criez de joie en l'honneur du Dieu de Jacob » (Ps 80,2). Il n'est pas déplacé de dire tous ensemble : « Je bénirai le Seigneur en tout temps ; sa louange sera sans cesse sur mes lèvres » (Ps 33,2) ni, quand je me trouve seul, de proclamer : « Magnifiez avec moi le Seigneur, exaltons tous ensemble son nom » (Ps 33,4) et bien d'autres expressions semblables. La solitude n’empêche personne de parler au pluriel, et la multitude des fidèles peut très bien s’exprimer au singulier. La puissance de l'Esprit Saint qui habite chacun des fidèles et les enveloppe tous ensemble fait qu’il y a ici une solitude toute peuplée, et là, une multitude qui ne fait qu’un.

Opuscule 11 « Dominus vobiscum », 6 (trad. Migne 1992, p.22 rev. ; cf Orval)

separ ecrit biblio« Vous avez négligé ce qu’il y a de plus grave dans la Loi : la justice, la miséricorde et la fidélité »

      Si tu veux cheminer correctement, avec discrétion et avec fruit sur la route de la vraie religion, tu dois être austère et rigide avec toi-même, mais paraître toujours joyeux et ouvert avec les autres, t'efforçant en ton coeur de cheminer sur les sommets de la droiture, tout en sachant t'abaisser avec bonté vers les faibles. Bref, devant le jugement de ta conscience, tu dois modérer les rigueurs de la justice, de telle sorte que tu ne sois pas dur pour les pécheurs, mais accessible au pardon et indulgent…

      Estime ton péché dangereux et mortel ; celui des autres, nomme-le fragilité de la condition humaine. La faute que tu estimes chez toi digne d’une correction sévère, pense que, chez les autres, elle ne mérite qu’un petit coup de baguette. Ne sois pas plus juste que le juste : crains de commettre le péché, mais n'hésite pas à pardonner au pécheur. La vraie justice n'est pas celle qui précipite les âmes des frères dans le piège du désespoir... Il est bien dangereux le feu qui, en brûlant des buissons, menace d'embraser la maison elle-même avec l'ardeur de ses flammes. Non, celui qui épluche volontiers les défauts des autres n'évitera pas le péché, car, même s'il est mû par le zèle de la justice, tôt ou tard, il se laissera aller au dénigrement.

      Evidemment, si notre vie ne nous paraissait pas si brillante, celle des autres ne nous semblerait pas si laide. Et si, comme il le faudrait, nous étions pour nous des juges sévères, les fautes d'autrui ne trouveraient pas en nous des censeurs aussi rigoureux.

Opuscule 51 ; PL 145, 749s (trad. Migne 1992, p. 125 rev.)

 

 

 

 

 

 

 

Date de dernière mise à jour : 2020-02-20